Écho de presse

1923 : « Le Diable au corps » déchaîne les passions

le 03/08/2019 par Marina Bellot
le 07/09/2017 par Marina Bellot - modifié le 03/08/2019
Extrait de L'Action Française en date du 12 avril 1923 - source : RetroNews-BnF

AU début des années 1920, Le Diable au corps, écrit par Raymond Radiguet à seulement 17 ans, crée la stupeur et suscite une avalanche de réactions passionnées.

Le Diable au corps. En 1923, le nom de ce roman est sur toutes les lèvres, dans tous les journaux. Son auteur, Raymond Radiguet, n'a alors que 19 ans et n'en avait que 17 à l'écriture de ce livre.

Le récit est celui d'une passion entre un adolescent et une jeune femme dont le fiancé se bat sur le front durant la Première Guerre mondiale.

Bernard Grasset, son éditeur, lance le roman de façon spectaculaire. Provocant, brillant, désabusé, cynique... Le Diable au corps déchaîne immédiatement des passions contraires, attire et choque à la fois, comme le relève La Presse

L'Homme libre en publie un extrait en avril 1923 :

"Depuis quelques jours, un remue ménage se faisait au-dessous, d'autant plus distinct que nous entendions, de notre chambre, les moindres bruits du rez-de-chaussée. [...] Jugez de ma stupeur quand je sus que la distraction des Marin était de se tenir sous notre chambre vers la fin de l'après-midi et de surprendre nos caresses.
Sans doute y avaient-ils pris goût, et voulaient-ils publier leurs plaisirs. Bien entendu, les Marin, gens respectables, mettaient ce dévergondage sur le compte de la morale. Ils voulaient faire partager leur révolte par tout ce que la commune comptait de gens comme il faut."

Le roman de Radiguet connaît un succès fulgurant, malgré (ou grâce à) l'auréole de scandale qui a entouré sa sortie. L'Intransigeant résume :

"Disons-le sans fard : tout a été fait pour décrier par avance ce roman d’un débutant. Nous ne sommes point faits encore à ces procédés de publicité à l’américaine ; et, parce qu’on lui a seriné, de toutes les manières que ce roman est génial, ce n’est qu’avec quelque défiance que le lecteur français ouvrira le volume. Eh bien, ce roman n’est point génial, bien entendu, mais il est très remarquable."

Comme nombre d'autres journaux, Le Journal des débats politiques et littéraires s'enthousiasme pour ce roman initiatique sur fond de guerre.

"On pense que ce n'est pas sans défiance que j'ai ouvert Le Diable au corps. Eh bien ! ma défiance a vite cédé le pas à un étonnement qui n'a fait que grandir au fur et à mesure que j'avançais dans ma lecture. [...] Eh quoi ! un pouvoir d'analyse si vif à l'âge de la spontanéité juvénile, au moment où la vie nous projette avec une force irrésistible dans l'objet de nos désirs, n'est-ce pas incroyable ? [...]   La découverte des joies sensuelles, l'essai du pouvoir de domination de l'homme, l'analyse des sentiments qui surgissent dans un cœur d'enfant à son début dans l'existence soutiennent largement l'intérêt du livre."

Analyse autrement plus politique dans L'Humanité :

"Tout l'intérêt du Diable au corps est d'être un témoignage inattendu, cynique exprès, mais sincère tout de même et plus que ne le croit l'auteur, sur la génération de ces garçons de la bourgeoisie, dont l'adolescence s'est passée ou a commencé durant la guerre. [...] Ils ont peur de la vie et ils ont peur de l'avenir social. Et l'avenir social, ils savent très bien que c'est la révolution ouvrière."

Et Le Journal de prédire avec clairvoyance :

"Un grand nombre de critiques ont qualifié de chef-d'œuvre le roman de Radiguet ; le public en a fait un grand succès et la postérité le consacrera définitivement."

Raymond Radiguet mourra quelques mois après la sortie de son livre, en décembre 1923. Cette mort prématurée contribuera à la notoriété du Diable au corps (voir notre vidéo).

 

 

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Raymond Radiguet
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Raymond Radiguet