Écho de presse

1937 : « L'Espoir » de Malraux dans le journal Ce Soir

le 28/05/2018 par Marina Bellot
le 19/05/2017 par Marina Bellot - modifié le 28/05/2018
Ce Soir du 8/11/1937 - Source : BnF RetroNews

En 1937, André Malraux publie dans le journal "Ce soir" son roman sur la guerre d'Espagne, L'Espoir, une ode à l'engagement et une réflexion sur la condition humaine.

Quand André Malraux choisit d’écrire et de publier L’Espoir, qui paraît en feuilleton dans le quotidien Ce soir [Voir les archives] à partir d'octobre 1937, la guerre d'Espagne est loin d'être terminée. Militant antifasciste, l'écrivain a combattu aux côtés des républicains espagnols.

L'absurdité de la guerre, ses atrocités, mais aussi la noblesse de la révolte et la force de l'union des hommes face au danger : de son engagement, Malraux a tiré un récit puissant, où le bruit des obus et la fureur de la guerre sont omniprésents :

"Le soir sans soleil couchant et sans autre vie que celle du feu, comme si Madrid eût été portée par une planète morte, faisait de cette fin de journée un retour aux éléments. Tout ce qui était humain disparaissait dans la brume de novembre crevée d'obus et roussie de flammes. [...]

Les trois plus grands hopitaux brûlaient. L'hotel Savoy brûlait. Des églises brûlaient, des musées brulaient, la bibliothèque nationale brûlait, le ministère de l'interieur brûlait, une halle brûlait, les petits marchés de planches flambaient, les maisons s'écroulaient dans les envolées d'étincelles, deux quartiers striés de longs murs noirs rougeoyaient comme des grils sur des braises ; avec une solennelle lenteur mais avec la rageuse ténacité du feu, par l'Atocha, par la rue de Léon, tout cela avançait vers le centre, vers la Puerta del Sol qui brûlait aussi.
C'est le premier jour..., pensa Shade."

L'intrigue se situe exclusivement dans le camp républicain. Juillet 1936 : des soulèvements de militants fascistes secouent l'Espagne. Face à cette menace grandissante, communistes, anarchistes et socialistes s'arment. Par leur courage et leur détermination, ils pensent pouvoir arrêter l'ennemi. C'est à une ode à l'engagement que se livre le romancier :

"Shade avait vu la Pasionaria, noire, austère, veuve de tous les tués des Asturies, conduire dans une procession grave et farouche, sous des banderoles rouges qui portaient sa phrase fameuse "il vaut mieux être la veuve d'un héros que la femme d'un lâche", 20 000 femmes qui, en réponse à une autre longue phrase indistincte, scandaient le même no parasan, il en avait été moins ému que cette foule bien moins nombreuse, mais invisible, dont l'acharnement dans le courage montait vers lui à travers la fumée des incendies."

Mettant en scène la tension permanente entre espoir et désarroi, Malraux prend résolument le parti de l'espoir. Grâce à la discipline révolutionnaire et aux renoncements, les Républicains triomphent du fascisme. Pour autant, l'écrivain nuance son propos et invite à la réflexion : 

"Pour un homme qui pense, la révolution est tragique. Mais pour un tel homme, la vie aussi est tragique. Et si c'est pour supprimer sa tragédie qu'il compte sur la révolution, il pense de travers, c'est tout."