Écho de presse

L’an 2000, "apothéose du progrès"

le 25/05/2018 par Pierre Ancery
le 20/03/2017 par Pierre Ancery - modifié le 25/05/2018
Affiche pour la Poste électrique internationale ; 1899 - source Gallica BnF

Electricité partout, progrès fabuleux de la technique, de la médecine… En 1922, un journaliste imagine à quoi ressemblera l’avenir.

Le 21 février 1922, le journaliste du Figaro Paul-Louis Hervier s’interroge : à quoi ressemblera l’an 2000 ?

"L'an 1000 fut marqué par une panique universelle et folle. L'an 2000 ne connaîtra que l'apothéose du progrès. Le progrès, ou ce que nous appelons ainsi, fait depuis peu des pas de géants. Nous vivons actuellement entourés des améliorations ou des évolutions qui datent à peine d'un quart de siècle. Que verrons-nous demain ? Que verront dans soixante-dix-huit ans les habitants de la Terre ?"

Davantage que les progrès sociaux ou économiques, ce sont surtout les avancées de la technique qui fascinent l’éditorialiste. Celui-ci se plaît à imaginer un monde où "les trains sans doute existeront encore, mais ils seront électriques et ils iront si vite qu'on pourra, de Bruxelles ou Paris, gagner la Riviera ensoleillée en quelques heures", et où "toutes les machines de toutes les usines seront mues certainement par l'électricité".

Même "dans les appartements", affirme-t-il, "tout sera électrique : la cuisine, le balayage, le lavage". Ainsi, "la crise des domestiques sera peut-être enfin résolue".

Les progrès fulgurants de la médecine, eux aussi, laissent envisager une véritable révolution des modes de vie.

"Sa sœur merveilleuse, la chirurgie, aura-t-elle découvert les secrets de la vie plus belle, de la vie éternelle ? Prolongera-t-on l'existence des hommes, améliorera-t-on l'espèce humaine ? Un successeur du docteur Voronof rendra-t-il communs et aisés le changement des sexes et le rajeunissement par étapes des vieillards ?"

Et qu’en sera-t-il des villes ? Un possible paradis, grâce à la science :

"L'air des grandes cités sera devenu plus respirable. Il n'y aura plus de fumées d'usines. On se déplacera facilement grâce à de confortables trottoirs roulants souterrains ou peut-être même grâce à des wagonnets aspirés rapidement en des tubes pneumatiques."

Mais Paul-Louis Hervier, s’il s’amuse à jouer les Nostradamus optimistes, n’est pas complètement dupe de ses propres prévisions… Car c’est avec une certaine malice qu’il conclut :

"C'est toujours le rêve que nous n'avons pas qui se réalise. Il est impossible de faire d'exactes prévisions, le progrès le plus inattendu se manifestera soudain dans le domaine dont on ne semblait pas s'occuper. Si un journal, dans soixante dix-huit ans, retrouve l'exemplaire du journal où a paru cet article, peut-être le reproduira-t-il avec quelques commentaires amusés. « Si ce pauvre chroniqueur qui vivait en 1922, écrira-t-il, revenait parmi nous, il n'en reviendrait pas. Nous avons fait bien d'autres progrès que ceux qu'il prévoyait. Il nous voyait végétant ; or, nous vivons... » Peut-être au contraire est-ce nous qui vivons : je me souviens qu'un humoriste prévoyait que les hommes de l'avenir n'auraient plus d'estomac, puisqu'ils ne mangeraient plus ; plus de jambes puisqu'ils ne marcheraient plus. Je m'arrête. Après tout, nous nous sentons parfois bien heureux tels que nous sommes !"

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