Écho de presse

Reportage chez un marchand de squelettes

le 25/05/2018 par Marina Bellot
le 11/12/2016 par Marina Bellot - modifié le 25/05/2018
Extrait de L'Intransigeant du 7 juin 1933 - source : RetroNews-BnF

En 1933, le journal L'Intransigeant offre à ses lecteurs une petite virée dans un magasin peu ordinaire.

Dans les années 1930, un certain M. Lavalette tient une boutique bien connue des habitants du quartier de l'École de Médecine à Paris, et en particulier des étudiants désireux d'exercer leur talent de dissection...

Le journal L'Intransigeant propose à ses lecteurs une visite guidée surréaliste de ce lieu improbable "dont la visite n’est certes pas à recommander aux personnes sensibles" :

"Les ateliers Lavalette ! Peut-on s’imaginer quelque chose de plus hallucinant ! Depuis une trentaine d’années, un crâne, un véritable crâne humain, pendu à une fenêtre du premier étage, indique aux passants qu’il y a là un honnête commerçant qui travaille sans relâche pour permettre aux étudiants d’apprendre, pièces en mains, comment est constituée la charpente humaine."

S'ensuit une savoureuse description de l'échoppe :

"Figurez-vous deux pièces très petites, deux réduits plutôt ! Devant la fenêtre de la pièce en façade, un squelette est suspendu au plafond par un croc de boucher. À vrai dire, il lui manque la tête et une jambe ; à côté de lui voisine un autre décharné, complet celui-là, mais recouvert d’un peignoir de coiffeur ! Sa toilette est presque terminée. (...)

Et tout autour de lui, c’est un amoncellement inimaginable d’ossements de toutes sortes : tibias, fémurs, crânes qui ont roulé sur le plancher défoncé comme de simples calebasses au centre desquelles bâille un trou sinistre. Au mur, ce sont de longs chapelets qui pendent et dont les grains sont autant de vertèbres plus ou moins noircies. Et dans de petites boîtes, des cartilages en vrac attendent qu’on les nettoie pour les ajuster, sur des cages thoraciques reconstituées."

Autant d'os qui proviennent des dépouilles que nul ne réclame dans les hôpitaux.

"Ce sont de pauvres bougres qui font toujours la richesse de leur pays, même après leur mort, conclut papa Lavalette qui est un philosophe."

Quant à la fillette de "Papa Lavalette", qui fait ses devoirs au milieu des ossements, le journaliste facétieux conclut :

"Elle ne songe qu’à ses terminaisons, tandis que son regard fixe, sans le voir, le petit fœtus qui, sur une étagère, macère dans son bocal."