Écho de presse

Saint-Just et la souveraineté du peuple

le 29/05/2018 par Pierre Ancery
le 05/05/2017 par Pierre Ancery - modifié le 29/05/2018
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1793 ; source Gallica

Le 24 avril 1793, Saint-Just prononce un discours sur la Constitution de la France. Souveraineté du peuple, égalité des citoyens et haine de la tyrannie en forment le socle.

Révolutionnaire exalté, Louis Antoine de Saint-Just se rendit célèbre par son art oratoire. Membre du groupe des Montagnards et proche de Robespierre, il prôna sans relâche l'égalité et la vertu. Le discours qu'il prononce le 24 avril 1793 à la Convention nationale est un exemple célèbre de son éloquence.

 

Saint-Just, avec les membres du comité de salut public, travaille alors au projet de constitution qui doit être présenté à la Convention. Son discours (reproduit deux jours plus tard dans Le Républicain français), explique la philosophie égalitaire et démocratique de ce projet.

 

"Tout peuple est propre à la vertu et propre à vaincre ; on ne l'y force pas, on l'y conduit par la sagesse. Le Français est facile à gouverner ; il lui faut une Constitution douce sans qu'elle perde rien de sa rectitude. Ce peuple est vif et propre à la démocratie ; mais il ne doit pas être trop lassé par l'embarras des affaires publiques ; il doit être régi sans faiblesse, il doit l'être aussi sans contrainte."

 

Souveraineté du peuple, haine de la tyrannie : Saint-Just s'oppose à l'autorité comme principe inspirateur du gouvernement. L'"harmonie" doit au contraire le guider. Il est vain d'exercer une loi violente et contraignante, car "si l'on donnait à l'homme des lois selon sa nature et son cœur, il cesserait d'être malheureux et corrompu". La tyrannie, au contraire, engendre la "corruption du peuple" :

 

"La tyrannie est intéressée à la mollesse du peuple ; est intéressée aux crimes ; elle est de moitié dans toutes les bassesses et les attentats ; elle arma le fils contre le père par la loi civile, elle arme les morts contre les vivants ; tout est pression et répression. C'est elle qui assassine sur un chemin par le bras d'un voleur ; c'est elle qui corrompt les cœurs et les déprave sous le joug. Elle endort l'âme humaine. Si donc un pareil ordre de choses cesse, le peuple qui n'a plus devant les yeux cet appareil du faste qui ne corrompt pas moins le pauvre que le riche, par l'envie, le fait s'avilir par l'appât du gain, ou le pousse à de lâches professions, ou le séduit : le peuple alors se régénère et redevient lui-même."

 

D'où l'importance d'une Constitution bonne et forte :

 

"De ce que je viens de dire, il dérive que la médiocrité de la personne qui gouverne, est la source des mœurs et de la liberté dans un État : il faut que ceux qui sont dépositaires de vos lois, soient condamnés à la frugalité, afin que l'esprit et les goûts publics naissent de l'amour des lois et de la patrie."

 

Saint-Just conclut :

 

"Si vous voulez la république, attachez-vous au peuple, et ne faites rien que pour lui; la forme de son bonheur est simple, et le bonheur n'est pas plus loin des peuples qu'il n'est loin de l'homme privé. […] Je regarde comme le principe fondamental de notre république, que la représentation nationale y doit être élue par le peuple en corps. Celui qui n'est pas élu immédiatement par le peuple ne le représente pas."

 

La Constitution de l'an I sera précédée de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1793 (rédigée par Saint-Just et Hérault de Séchelle). Promulguée solennellement le 24 juin et, elle ne fut jamais appliquée : le 10 octobre, la Convention remplace le gouvernement par un gouvernement révolutionnaire qui devait durer jusqu'à la paix. Saint-Just sera guillotiné le 28 juillet 1794 avec les partisans de Robespierre.  

 

 

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