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La mort de Louis XVIII en 1824

le par - modifié le 05/08/2020
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Les funérailles d’un roi sont un moment marquant dans l’histoire d’un royaume et l’occasion d’affirmer la solidité du régime. C’est ce qui se passe lors de la mort du roi Louis XVIII (16 septembre 1824) et ses funérailles (25 octobre 1824).

La mort d’un roi

Depuis plusieurs années, Louis XVIII souffre de la goutte, rendant tout déplacement difficile et l’obligeant à se déplacer grâce à des béquilles. Offrant l’image d’une monarchie affaiblie, malade, le roi devient la risée du peuple et des caricaturistes, qui le représentent en cochon ou en éléphant.

Un « Éléphant vu par derrière » ; Collection de Vinck. Un siècle d'histoire de France par l'estampe - source : Gallica-BnF

Malgré son état de santé s’aggravant, il refuse de s’aliter et de donner l’image d’un roi vaincu par la maladie. Il se plaît à citer l’empereur romain Vespasien qui assurait qu’un empereur doit mourir debout mais son attitude témoigne également de son vœu d’une « bonne mort », qui est celle de l’abandon volontaire à la contrition.

Le 12 septembre 1824, il est contraint de garder le lit et se confie à son confesseur, l’abbé Rocher. La gangrène ronge son corps qui se décompose et dégage une odeur nauséabonde, empêchant sa famille de rester à son chevet. Toute la Cour se presse dans les appartements privés en attendant le moment fatidique. Le 16 septembre 1824, Louis XVIII décède.

S. M. Louis XVIII à ses derniers moments ; Fournier - source : Gallica-BnF

Les funérailles d’un roi

Mort de Louis XVIII. Le 16 septembre 1824 - source : Gallica-BnF

L’exposition publique du corps (près de 200 000 personnes se seraient présentées) doit permettre l’accompagnement spirituel du défunt. A cet effet, une chapelle ardente est dressée dans la salle du trône du château des Tuileries.

Le 25 octobre 1824, le cortège funèbre quitte le château des Tuileries afin de gagner la basilique de Saint Denis, en passant sous l’arc de triomphe du Carrousel. Le choix de maréchaux d’Empire afin de participer à la cérémonie funéraire est un geste politique fort. Le cortège, outre les autorités constituées et les autorités militaires, est composé de nombreux pauvres, dont la présence a une fonction quasi religieuse, celle d’une forme d’intercession,.

Pour cette occasion, la basilique est décorée selon la tradition d’avant la Révolution. L’église est drapée de noir. Devant le catafalque sont placés le manteau royal et les régalia, que Louis XVIII avaient fait reconstituer. Les armes de France et les fleurs de lys permettent d’inscrire Louis XVIII dans la continuité de sa dynastie.

Cette théâtralisation et cette instrumentalisation de la mort du roi doivent servir à affermir le pouvoir, à renforcer le traditionalisme royaliste et à démontrer la vigueur des institutions de la Restauration.

Funérailles de Louis XVIII. Le cortège passant sur la place Vendôme du jeudi 23 septembre 1824 - source : Gallica-BnF

Des funérailles qui renforcent la monarchie ?

La question de la succession a été omniprésente durant le règne de Louis XVIII. Les espoirs dynastiques des Bourbons sont fragiles. Depuis la mort de son épouse Marie-Joséphine de Savoie le 13 novembre 1810, Louis XVIII est veuf  sans enfant. C’est donc son frère, Charles-Philippe, comte d’Artois, qui prend sa succession.

Parmi les nombreuses personnes présentes, Ferdinand-Philippe d’Orléans décrit dans ses mémoires une cérémonie en « contresens choquant pour [l’] époque et [les] mœurs ». Il regrette une cérémonie ridicule, marquée par l’esprit rétrograde du Roi et de la Cour dont certains moralistes notent la rigidité. George Sand déplore une cérémonie « interminable » et les « formes de l’antique étiquette monarchique et religieuse » qui ont un intérêt historique mais aucun intérêt politique.

Pour des raisons de préséances, le clergé parisien est totalement absent des cérémonies, ce qui apparaît comme un scandale sans précédent et conforte la rumeur d’un enterrement civil, qui se diffuse parmi les Ultras. L’alliance du Trône et de l’Autel n’est pas montrée publiquement lors des funérailles de Louis XVIII mais le seront lors des cérémonies du Sacre de Charles X en 1825.

Exposition du corps du feu roi Louis 18, dans la salle du trône ; C. de Lasteyrie ; 1824 - source : Gallica-BnF

Louis XVIII (1755-1824)

Fils du dauphin  Louis-Ferdinand et de Marie-Josèphe de Saxe, il est le frères de Louis XVI et de Charles X. Le comte de Provence émigre le 20 juin 1791 et s’engage dans la lutte armée contre le gouvernement révolutionnaire. Après la mort de Louis XVI, il se proclame régent pour le dauphin puis devient prétendant au trône en 1795. Il revient en France en 1814 mais doit quitter le trône en mars 1815 lors du retour de Napoléon Ier. Après la bataille de Waterloo, il revient de nouveau au pouvoir. Étant décédé sans descendant, son frère, le comte d’Artois, lui succède en 1824.

Louis XVIII, roi de France, estampe, Cardon, Basset, 1817 - source : Gallica-BnF

Bibliographie

 

Emmanuel Fureix, La France des larmes. Deuils politiques à l’âge romantique (1814-1840), Champ Vallon, Seyssel, 2009.


Bertrand Goujon, Monarchies postrévolutionnaires, 1814-1848, Seuil, Paris, 2012.


Philip Mansel, Louis XVIII, Perrin, Paris, 2013.