Chronique

Quand la voiture ubérisait les chevaux

le 08/11/2019 par Pierre Haski
le 24/02/2016 par Pierre Haski - modifié le 08/11/2019
Collection Jules Beau. Photographie sportive T.7- Jules Beau - [s.n.] - 1898 - Source BnF

En pleine guerre entre les VTC et les taxis traditionnels, Pierre Haski, le fondateur et rédacteur en chef du site d'information Rue89, rappelle que ce n'est pas la première fois que des services ou des technologies dites "de rupture" viennent ruiner des secteurs établis.

Travis Kalanick, le fondateur d'Uber, a sorti une de ces répliques dont l'histoire se souviendra. En plein conflit entre VTC et taxis traditionnels, il a lancé en janvier 2016 au Ministre français de l'Economie, Emmanuel Macron, qui évoquait l'hypothèse qu'Uber indemnise au moins en partie la perte de valeur des licences des chauffeurs de taxis : "Les fabricants de voitures ont-ils payé pour la disparition des chevaux ?..."

Cette interrogation en forme de boutade a pour mérite de rappeler que ce n'est évidemment pas la première fois que des services ou des technologies dites "de rupture" viennent littéralement ruiner des secteurs établis. On pense aussitôt à l'imprimerie de Gutemberg qui a assurément mis au chômage des milliers de moines copistes dont l'histoire n'a guère gardé la trace de leur malheur ; ou, évidemment, au chemin de fer puis à l'automobile qui ont ruiné le transport à cheval au XIX° siècle.

La presse de l'époque se faisait régulièrement l'écho de cette question, y compris, Travis Kalanick serait surpris de l'apprendre, en termes sonnants et trébuchants.

Ainsi, La Croix du 12 août 1899 se fait l'écho d'une étude de la Revue politique et parlementaire sur une conséquence imprévue de "la vague toujours croissante de l'automobilisme" : "diminuer considérablement le nombre de chevaux mobilisables en cas de guerre". L'auteur, Paul Bobigny, rappelle que :

"La taxe sur les chevaux et voitures, depuis son origine jusqu'à nos jours, a été, et n'est encore, qu'un impôt somptuaire, c'est-à-dire un impôt de luxe. Qu'est-ce donc qu'un objet de luxe ? Tout objet superflu. Or, le cheval est un objet de première nécessité puisqu'il est indispensable à la guerre. L'erreur vient de ce que l'impôt a été créé à une époque où les chevaux de l'armée étaient les seuls dont on se préoccupait au point de vue de la guerre. Mais aujourd'hui, il n'en va plus ainsi. En temps de paix, le cheval de luxe est peut-être un objet superflu, mais en temps de guerre, il est utile au premier chef. Et la guerre est une menace incessante suspendue au-dessus de nos têtes".

Sans doute l'auteur ne pouvai...

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