Extrait du journal

» Il serait trop hardi de juger dès à présent des résultats que cette guerre doit produire dans l'avenir. L'empire de Maroc est divisé en deux partis très distincts entre eux : le parti de la paix et le parti de la guerre, qui conserveront toujours leur caractère propre. Les villes du littoral, qui sont les plus civilisées, et quelques villes de l'intérieur, surtout celles du royaume de Soure, le plus riche et le_ mieux cultivé de l'empire, sont très portées pour la paix. Mais dans le Maroc les villes ne sont pas, comme en France, des centres de force et de puissance ; elles servent seulement, on peut le dire, d'asile et de re fuge aux commerçans indigènes, aux juifs et aux Euro péens, que la population hait et méprise. Le parti de la guerre, au contraire, c'est la masse de la population ; plus elle est éloignée des grandes villes, plus elle est indépen dante. Ainsi nos frontières sont habitées surtout par une population belliqueuse sur laquelle l'Empereur exerce peu d'action. Les opérations sur les côtes d'Afrique ont eu pour résultat d'affaiblir le parti de la paix ; et soyez convaincu que si ces démonstrations eussent continué, si l'Empereur eût quitté par exemple Rabat où il s'était réfugié, fuyant, on peut le dire, devant le parti guerrier, il n'y a pas de doute qu'une grande révolution ne se fût accomplie dans ce pays ; une autre dynastie serait montée sur le trône ; peut être Abd-el-Kader lui même eût été proclamé Empereur; et la France serait obligée d'avoir constamment une armée d'observation sur ses frontières, ou de pénétrer dans l'in térieur du pays et de faire d'immenses sacrifices d'hommes et d'argent pour occuper en définitive un désert. La ba taille çL'lsly a eu cet heureux résultat qu'elle a rétabli en quelque sorte l'équilibre entre les deux partis dans ce pays, en répandant la terreur parmi les populations belliqueuses de nos frontières....