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La Croix, 1 octobre 1902

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La Croix
1 octobre 1902


Extrait du journal

Zola est mort. Est-ee par accident? Est-ce par suicide ? On assure que c’est par accident. J’aime mieux cela. C’est un crime de moins dont il aura à répondre devant Dieu. Il a fait bien du mal à la France, dont il sacrifia le repos et la renommée aux satis factions de son formidable orgueil. Il en fit aussi à ses concitoyens, qu’il déprava par ses peintures grossières et par ses doctrines perverses et décourageantes. Il eu fit enfin à la littérature de son pays, qu’il dévoya de ses traditions de bon goût. Le mal qu’il fit à la France commença à son trop fameux : « J’accuse ». Là aussi prit fin, comme premier châtiment, son renom d’écrivain. Les efforts qu’il tenta pour le retrouver furent vains. Et c’est au cours d’une publication dont il escomptait le scandale pour surmonter la dédaigneuse indifférence dupublicque la mort l’a atteint. Son orgueil qui fit sa fortune fit aussi sa détresse. Il avait trop présumé de sa force. Non content de créer des personnages hors nature, il s’était fait lui-même un de ces personnages, et avait bâti un roman autour de lui. Il tomba avec son roman. Toute une génération se corrompit à ses écrits d’unejiiopudeur sans précédent. Zola ne s’est pas suicidé, paraît-il, soit, il n’en était pas encore là ; mais combien en ont eu assez de la vie, après avoir lu Pot-Bouille! Combien ont été dégoûtés d’un monde où ne se mouvait qu’une société tarée! Combien ont fui la pureté réparatrice des champs, dont il ne montra que le fumier dans La Terre! Il détruisit pour beaucoup l’idée de Dieu ; pour beaucoup d’autres, l’idée de patrie ; il voulut détruire pour tous l’idée de morale. ‘ La jouissance matérialiste était vantée par lui. Elle fut son propre lot, pendantla moitié de sa vie. Quand vinrent les revers, ayant prêché la désespérance il y marchait lui-même, et, puisqu’il ne s’est pas suicidé, l’accident de la rue de Bruxelles l’a préservé de commettre ce nouveau crime. Il n’eût pas été de force à supporter l’adversité. La littérature française se ressentira long temps de son passage dans les lettres. Une réclame effrontée, un pufûsme scandaleux faisaient delui un maître qui eut de nombreux disciples. Mais tandis que sur l’engrais de ses œuvres poussaient quelques fleurs, ses élèves u’ont faitque s»vautrer dans l'engrais. L’Académie ferma l’oreille au retentisse ment des boniments clamés autour de son œuvre; elle refusa son entrée à l’auteur de La Terre et de Germinal, ne consentant pas à goûter l’harmonie des bruyantes dé. monstrations de son héros des campagnes, et à ranger- parmi les belles lettres ce qu’il montrait de la Mouquette. La mort l’a frappé bien inopinément et bien tristement. Car, qui sait? peut-être les éternelles vérités eussent-elles fini par péné trer sa grande intelligence, et notre suprême espérance est que les courts instants, pen dant lesquels fi a vu venir la mort, ont ! arraché de son cœur la parole de repentir que Dieu recueille dans soa adorable misé ricorde l J. B....

À propos

La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.

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