Écho de presse

1917 : La bataille de la cote 70

le 28/05/2018 par Marina Bellot
le 31/07/2017 par Marina Bellot - modifié le 28/05/2018
Illustration : La Croix du 17 août 1917 - Source : BnF RetroNews

En août 1917, les Britanniques et les Canadiens s'emparent des hauteurs de Lens, aux mains des Allemands, causant à l'ennemi de lourdes pertes.

15 août 1917. Alors que la ville de Lens est entre les mains des Allemands depuis octobre 1914, le Corps canadien et le 1er Corps britannique lancent une offensive dans le Pas-de-Calais, aux alentours de la ville.

L'objectif des alliés est clair : s'emparer de la ville de Lens. Ce faisant, ils veulent contraindre l'ennemi à engager un maximum d'unités allemandes et ainsi les affaiblir sur un autre front, celui de la bataille de Passchendaele. Mais, pour conquérir Lens, il faut d'abord prendre le contrôle de la colline 70, au nord de la ville, et de la colline de Sallaumines au sud-est, deux hauteurs qui permettent d'observer les zones alentour et de contrôler la ville de Lens elle-même.

Le Journal rend compte de la difficulté de la tâche :

"Quand, du haut de la colline de Lorette, on aperçoit au-dessous de soi l'énorme agglomération des toits vermillon de Lens, on se rend compte de l'impossibilité de pénétrer dans un pareil guêpier. Il faut l'envelopper par le nord et par le sud. Seulement, de l'un comme de l'autre côté, Lens est gardé par deux sortes de piliers qui commandent complètement la ville. Au nord, c'est la cote 70 ; au sud, c'est la colline de Méricourt, haute également de soixante-dix mètres. Entre ces deux redoutables gardiens, la ville de Lens s'enfonce à moins de trente mètres. Elle est donc commandée de part et d'autre, de plus de quarante mètres. S'y enfoncer sous les yeux de ces deux gardiens, ce serait se faire massacrer par eux. Il faut donc enlever d'abord la cote 70 au nord et Méricourt au sud. Il est d'ailleurs vraisemblable que la chute d'un de ces deux bastions suffit à rendre Lens intenable pour l'ennemi."

L'attaque débute à l'aube du 15 août 1917. Dès le 17 août, la presse française annonce avec emphase la réussite de l'offensive menée par les alliés. 

La Lanterne du 17 août rapporte :

"Ce matin, à 4h25, les troupes canadiennes ont attaqué les positions allemandes sur un front de plus de 3.200 mètres, au sud-est de Loos. Elles ont pris d'assaut les formidables défenses de la cote 70, - qui avaient résisté à nos attaques lors de la bataille de Loos, en septembre 1915, et que les Allemands ont améliorées et renforcées par tous les moyens depuis cette époque. Après avoir pris d'assaut le système de première ligne sur tout le front d'attaque, nos troupes poussèrent jusqu'aux lignes Ouest de la Cité Saint-Auguste, pénétrant dans les positions ennemies jusqu'à environ seize cents mètres en profondeur."

Dans Le Petit Parisien, on peut lire :

"La prise de la cote 70, que les Canadiens ont enlevée magnifiquement, est le plus beau et le plus important succès de la journée d'hier. [...] Formant une pente douce, d'environ un kilomètre de longueur, on la trouve à mi-chemin sur la route de Loos à Lens, qu'elle domine et dont elle est, en quelque sorte, la clé. Elle a été l'enjeu de toute la bataille. Autour d'elle se sont livrés les plus furieux assauts. Pour recouvrer cette position, dont on conçoit, maintenant, toute l'importance, les Allemands ont contre-attaqué cinq fois, faisant donner toutes leurs réserves, s'épuisant en efforts inouïs, laissant faucher des milliers d'hommes, parmi lesquels des régiments de la garde prussienne, qui, pris sous le feu des canons, ont été décimés."

Le journal évoque plus en détails ces funestes charges allemandes :

"À deux heures, ils débouchèrent, plus nombreux, entre le bois "Dix-Huit" et les corons Saint-Auguste et se ruèrent sur les Canadiens en poussant des cris de rage et des hurlements. Dans leur élan, ils arrivèrent jusqu'à des éléments de tranchées, dans lesquelles ils sautèrent, en essayant de s'y maintenir, mais, pour cela, il leur aurait fallu des renforts, qui n'arrivèrent pas. Ces tranchées furent leurs tombeaux. Pas un n'échappa."

"Une lutte sans merci", écrit Le Siècle : 

"Les défenseurs avaient reçu l'ordre de mourir sur place ; ils formaient deux divisions en ligne. Les hommes, nous le vîmes par l'examen des prisonniers, étaient en majorité des récupérés d'Allemagne ; ils avaient terriblement souffert avant même le déclanchement de notre attaque ; une division avait été quasi anéantie par une semaine de bombardement ; néanmoins, les Boches reçurent notre avance avec un certain stoïcisme, les corps à corps furent sans merci, c'est pourquoi, vous ne serez point surpris du petit nombre de prisonniers ; la lutte avait été sans miséricorde de part et d'autre."

9 000 soldats canadiens périrent dans la bataille de la cote 70, 25 000 Allemands furent tués ou blessés. L'offensive ne permettra pas de faire passer Lens sous contrôle des alliés mais les Allemands, occupés par les combats défensifs à la bataille de Passchendaele, ne tenteront pas de reconquérir le terrain perdu lors de la bataille.