Écho de presse

Le scandale de « L'Âge d'or » de Buñuel, film « satanique » et interdit

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Image extraite du film surréaliste « L'Âge d'or » de Luis Bunuel, 1930 - source : Université populaire du cinéma

En décembre 1930, la projection d'un film surréaliste est interrompue par des militants d'extrême droite. L'Âge d'or, qualifié d' « ignoble » et de « satanique » dans la presse conservatrice, sera interdit par le préfet de police Jean Chiappe.

Automne 1930. Luis Buñuel, le réalisateur espagnol d'Un Chien andalou, a achevé son nouveau film, L'Âge d'or, coécrit avec Salvador Dalí et généreusement financé par un couple d'aristocrates, le vicomte et la vicomtesse de Noailles.

 

L'Âge d'or se présente comme un montage surréaliste de soixante minutes baignant tout entier dans un humour noir dévastateur et multipliant les atteintes à la bienséance. Un homme se roule dans la boue sur fond de bruit de chasse d'eau. Plus loin, il renverse sans raison un aveugle. Un évêque est défenestré. Des aristocrates assistent avec indifférence à la mort d'un enfant, descendu d'un coup de fusil par son père.

 

Avant sa sortie, quelques critiques paraissent. Celle de L'Européen est flatteuse :

« Il serait aussi absurde de raconter un film de Buñuel que de le faire pour un tableau, une partition. Buñuel est Buñuel, qui essaierait de faire un film à sa manière se casserait les reins. Il est – on ne peut pas dire que ce soit son œuvre ou ses interprètes, tant sa personnalité apparaît – violent, cruel, sensuel. Il puise aussi bien au fait divers qu'à l'imagination la plus pure.

 

On aime Buñuel ou on ne l'aime pas […]. Mais tous, pour ou contre lui, doivent lui rendre un hommage : il n'a jamais cédé à personne, il ose réaliser et montrer ce qu'il conçoit. La censure elle-même s'est inclinée devant la conviction, devant la force de son œuvre. »

Le journaliste a parlé un peu vite : rarement la sortie d'un film suscitera un tel tollé. Le 22 octobre, L'Âge d'or est présenté en avant-première à une poignée de happy few : André Breton, Marcel Duchamp, Paul Eluard, Georges Braque, Man Ray... Puis il est projeté à partir du 28 novembre au Studio 28, rue Tholozé, à Montmartre.

 

Le 3 décembre, la séance est envahie par des militants d'...

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