Écho de presse

Faust, « tragédie de la perfectibilité » et miroir de l'angoisse moderne

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« Faust et Marguerite dans le jardin », tableau d'Ary Scheffer, 1846 - source : WikiCommons

Omniprésent dans la culture européenne dès le début du XIXe siècle, le mythe de Faust a inspiré une foule de musiciens, peintres, écrivains et cinéastes. De Goethe à Murnau en passant par Delacroix, tous ont su se réapproprier le célèbre motif du pacte avec le Diable.

Parmi les origines du personnage de Faust, on retient souvent l’œuvre de Goethe. Pourtant, cette légende populaire allemande trouve sa source dans la vie d'un personnage historique bien réel qui aurait vécu au XVIe siècle. Le dramaturge Christopher Marlowe en tira un drame, La Tragique histoire du Docteur Faust, dès 1594.

Mais c'est bien Goethe qui, avec ses trois pièces Urfaust (1775), Faust I (la plus fameuse, 1808) et Faust II (1833) rendit universellement célèbre le destin de ce savant qui pactise avec le Diable, lui promettant son âme en échange de la possibilité de goûter aux plaisirs terrestres – motif allégorique qui innervera tout le XIXe siècle.

Le Faust de 1808 deviendra l'une des œuvres majeures de la littérature allemande et fera de son auteur le grand écrivain national. En France, lorsqu'il est traduit, son Faust I fait également sensation. Dans un article louangeur paru en 1818 dans Le Journal des débats politiques et littéraires, Charles Nodier définit ainsi le génie de Goethe :

« Quelquefois il s'élance au-delà de ces tristes limites de la destinée humaine dans un monde qu'il a fait, car il est créateur partout.

Son Faust est un de ces rêves effrayants qui tourmentent le cœur au point de faire regretter de sentir. C'est un enchanteur qui a l'infini à sa disposition, et dont l'ascendant sur le monde moral aboutit à perdre tous ceux qu'il aime, et à se perdre avec eux.

Les Allemands appellent cette pièce le Malheur de la science. C'est la tragédie de la perfectibilité. »

Avec Goethe, Faust devient le reflet littéraire de toutes les angoisses et des questionnements du XIXe siècle naissant. À un moment où science et technique s'apprêtent à dissiper les brumes de la superstition, sa figure est celle de l'homme moderne en proie au doute.

Pour ce rédacteur du Globe, en 1827, le vrai sujet de la pièce est ainsi le tiraillement de l'Homme entre deux pôles, l'idéalisme et le matérialisme, c'est-à-dire d'un côté la connaissance de la vie, de l'autre la jouissance de la vie :

« Voilà, selon moi, la pensée fondamentale de Faust. C’est l'histoire du monde en abrégé.

L’idéalisme est personnifié dans ce philosophe inquiet et malheureux, qui, comme il le dit, voudrait se baigner dans les flots de la lumière céleste, et qui voit sans cesse les flots se ret...

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