Interview

Sculptrices : des difficultés d’être femme artiste au XIXe siècle

Mme Marcello, célèbre sculptrice du Second Empire, photo d'Adolphe Dallemagne, circa 1860 - source : Gallica-BnF

Il faudra attendre 1900 pour que les femmes soient admises à l’École des Beaux-Arts de Paris et 1903 pour qu’elles puissent concourir au prestigieux grand prix de Rome. Au Second Empire, les sculptrices sont « tolérées » plus qu’intégrées, nous dit l’historienne Pauline Milani.

RetroNews : Être sculptrice sous le Second Empire est, dites-vous, un « parcours semé d’embûches mais pas impossible ». Combien de femmes réussissent malgré les obstacles ?

Pauline Milani : En dépouillant les catalogues du Salon – ce que l’on appelle aussi l’« Exposition des artistes vivants » – qui se tient à Paris tous les ans ou tous les deux ans et qui est un passage obligé dans la reconnaissance artistique, j’ai pu comptabiliser 56 noms de femmes entre 1850 et 1870. Elles représentent ainsi, en proportion, 3 à 4 % des exposants : leur présence reste donc marginale, mais elle n’est pas négligeable pour autant.

D’autant que si certains noms n’apparaissent qu’une seule fois, d’autres reviennent de façon impressionnante : Fanny Dubois-Davenne y a, par exemple, exposé pas moins de 48 fois ! Elle fait partie de la dizaine de femmes que l’on peut considérer comme « sculptrices professionnelles » dans ces années 1850-1860. Et leur nombre ne cessera d’augmenter ensuite.

La période du Second Empire leur est-elle plus favorable que les décennies qui ont précédé ?

Il est vrai qu’après la Révolution française qui avait constitué une phase assez bouillonnante, les contraintes de genre ont eu tendance à se resserrer à nouveau dans la première moitié du XIXe siècle. Sous le Second Empire cependant, les femmes artistes ont sont relativement bien tolérées, quand elles ont réussi à franchir les barrières – à commencer par celle de la formation – et acquis les codes nécessaires.

Il s’agit d’un moment charnière, où les femmes sculptrices qui mènent chacune leur carrière préparent en quelque sorte le terrain pour la génération suivante. C’est bien parce qu’elle a acquis reconnaissance et notoriété dans les années 1850-1860 qu’Hélène Bertaux peut fonder en 1873 son école de dessin et de modelage, puis l’Union des femmes peintres et sculptrices en 1881.

Le Second Empire...

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