Au début du siècle dernier, la France est en pleine expansion coloniale et s'intéresse particulièrement au Tchad, comme l'explique Le Petit Parisien en avril 1900 :
"Depuis quelques mois, l'attention se porte tout particulièrement sur le Tchad : autour de ce lac du centre africain gravitent actuellement plusieurs missions françaises qui tentent d'en atteindre les bords qui par le nord, qui par le sud, en faisant prédominer l'influence de la France sur les populations qui l'entourent. Le Tchad a une importance toute particulière pour nos colonies d'Afrique : à mesure que se sont agrandies nos possessions du Soudan et du Congo, c'est par le Tchad que leur jonction pouvait s'accomplir (...) Dès lors, d'audacieuses explorations s'entreprirent. À l'heure actuelle, l'ère des explorations est passée, et l'ère de la conquête est ouverte. Trois missions concentrent leurs efforts dans cette région."
L’adversaire principal de la France est le conquérant d’origine soudanaise, Rabah, qui rêve d’instaurer un califat islamique à cheval sur le Tchad, le Cameroun, le Niger et le Nigéria.
Le 22 avril 1900, les trois missions françaises se retrouvent à Kousséri et écrasent l'armée de Rabah, qui trouve la mort dans les combats. Le chef des troupes françaises, le commandant Lamy, est aussi tué.
Ce n’est que le 28 juillet 1900, trois mois après l’envoi d’un télégramme annonçant la mort des deux combattants, que la nouvelle parvint en France et que les journaux relatèrent le combat, comme L'Ouest-Éclair le 31 juillet, qui cite le commissaire du gouvernement établi dans la région du Tchad :
"Rabah avait sous ses ordres 5 000 hommes dont 2 000 armés de fusils de tous modèles, 600 chevaux et plusieurs canons. Un engagement violent eut lieu qui ne dura pas moins de 2 heures et demie. Dans un assaut désespéré, nos vaillantes troupes délogèrent l'ennemi de son principal point d'appui, sorte de réduit entouré de fortes palissades et de terrassements. Elles lui coupèrent le passage au nord et au sud. C'est alors que nos soldats se lancèrent vers l'ouest sur les traces de Rabah. Pour protéger la retraite du gros de sa troupe, Rabah revint à la marge, et c'est dans cet engagement que nous avons eu la douleur de perdre le commandant Lamy et le capitaine de Cointé."
La région du Tchad passe dès lors sous souveraineté française et le nom du commandant est donné à la capitale de la nouvelle colonie : Fort-Lamy, rebaptisée N'Djaména en 1973.
Ecrit par
Marina Bellot est journaliste indépendante, diplômée de l'Ecole de journalisme de Sciences Po. Elle a co-fondé en 2009 Megalopolis, un magazine d'enquêtes et de reportages sur la métropole parisienne, qu'elle a dirigé pendant trois ans. Elle est l'auteure de plusieurs ouvrages pédagogiques à destination des adolescents et a co-écrit une biographie de Jean-François Bizot, L'Inclassable, parue chez Fayard en 2017.