Interview

L’école dans les colonies françaises, un instrument de domination ?

Religieuse enseignant à des enfants nord-africains, illustration de L. Mouligné, circa 1890 - source : Réseau Canopé-Creative Commons

De la première moitié du XIXe siècle aux années 1960, l'école de la République a enseigné à des centaines de milliers d'enfants en AOF, en Afrique du Nord et en Indochine. Corollaire de la « mission civilisatrice », un tel projet éducatif avait-il pour but de former des citoyens ou de conquérir les esprits ?

Diplômée de l'Institut d'études politiques de Grenoble et de l’EHESS, Carole Reynaud-Paligot est historienne et professeur d'Histoire et de sociologie à l'université de Bourgogne. Elle est également chercheuse au Centre de recherche en histoire du XIXe siècle.

On lui doit notamment La République raciale 1860-1930 en 2006, Races, racisme et antiracisme dans les années 1930 en 2007 et De l’identité nationale en 2011, toutes parues aux Presses universitaires de France. Dans L'École aux colonies, qui vient de paraître aux éditions du Champ Vallon, elle décrypte les mécanismes pluriels et paradoxaux de l'enseignement pendant la période coloniale et les effets de « racialisation » des populations colonisées.

Propos recueillis par Arnaud Pagès

RetroNews : A quel moment le système éducatif a-t-il été mis en place dans les colonies ?

Carole Reynaud-Paligot : Dès 1816, lorsque les français reprennent possession du Sénégal, Louis XVIII envoie sur place des militaires, du personnel administratif, des scientifiques, et un instituteur, qui s'appelle Jean Dard, afin de créer la première école publique à Saint-Louis. C'est symbolique. Dès le départ, il y a une volonté de civiliser les « Indigènes ». Mais qu'entend-on par civiliser ? En réalité, la dimension philanthropique passe au second plan. Il s'agit avant tout d'une co...

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