Chronique

La féminisation progressive des armées européennes aux XIXe et XXe siècles

Simone Segouin alias « Nicole », résistante française connue notamment pour avoir capturé 25 soldats allemands dans les environs de Chartres, 1944 - source : WikiCommons

Au XXe siècle débute une féminisation des armées, qui ne concerne dans un premier temps que les soins et l’auxiliariat logistique. Mais les deux conflits mondiaux amplifieront peu à peu la mobilisation féminine.

Cet article est paru initialement sur le site de notre partenaire, le laboratoire d’excellence EHNE (Encyclopédie pour une Histoire nouvelle de l’Europe). Il a été rédigé en commun par quatre historiens et historiennes : Élodie Jauneau, Julie Le Bac, Yannick Ripa et Fabrice Virgili.

Le port des armes est indissociable du pouvoir militaire dont la domination masculine a exclu les femmes, arguant de leur nature dite fragile et vouée à la maternité, et d’une virilisation que provoquerait leur armement.

Recourir aux armes pour défendre sa patrie contre un ennemi extérieur ou défendre ses idées dans un conflit fratricide, c’est s’inscrire dans le champ du politique et, à partir de la Révolution française, se revendiquer de la citoyenneté, deux postures refusées aux femmes. Tel est – et demeurera – l’enjeu d’une féminisation des armées officielles.

Le 25 mars 1792, Théroigne de Méricourt réclame le port des armes par les Françaises, expression de la pleine citoyenneté qu’elles revendiquent ; peu lui importe la présence séculaire des cantinières, blanchisseuses, ou même d’exceptionnelles combattantes, le plus souvent travesties en hommes, car elle est sans portée politique. Les révolutionnaires refusent cependant une subversion de l’ordre des genres : le décret du 30 avril 1793 congédie des armées les « femmes inutiles » et n’autorise que les vivandières.

Décret du 30 avril 1793, Le Mercure universel, 1er mai 1793

L’exclusion des femmes des armées se poursuit tout au long du XIXe siècle : leur mobilisation dans les guerres nationales se cantonne à donner des soins à de rares exceptions près. Pour avoir tué deux soldats autrichiens afin de récupérer le drapeau de son régiment de Zouaves lors de la bataille de Magenta (1859) et ainsi transgressé les normes de genre, la Française Annette Devron est la première femme décorée de la médaille militaire. Faute d’armée constituée, les guerres d’indépe...

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