Chronique

Automne 1944 : la découverte des camps nazis par l’Armée rouge

le par

Fantassin de l'armée soviétique et canon anti-char, Israel Ozersky, 1943 - source : RIA Novosti-WikiCommons

Tandis que les troupes soviétiques arrivent aux portes d’un Majdanek vide, les soldats prennent connaissance de toute la folie criminelle du nazisme. Dès lors, journalistes et cameramen russes commencent à rendre compte de l’atrocité hitlérienne dans l'Europe de l'Est occupée. 

Au cours de leur avancée vers l’Ouest à l’été 1944, les troupes soviétiques franchissent le fleuve Bug et pénètrent dans la région la plus orientale de la Pologne, occupée depuis 1939 par les Allemands, là où ont été édifiés, à l’image de Belzec, les premiers camps d’extermination nazis. À la périphérie de Lublin, la plus grande ville de la région, la découverte du camp de Majdanek le 24 juillet suscite un émoi sans précédent.

Bien que les Allemands aient procédé à l’évacuation des lieux peu auparavant, ils n’ont pu, dans leur hâte, faire disparaître toutes les traces de cette industrie de la mort que les Soviétiques découvrent avec stupeur. La présence de fours crématoires, de chambres à gaz, de baraquements, mais aussi d’ossements, de sacs de cheveux, d’effets vestimentaires, désigne l’horreur sans nom de l’entreprise nazie.

La découverte de ce premier camp d’extermination par les Alliés, en l’occurrence les Soviétiques, fait l’objet dans les semaines qui suivent de nombreux reportages et articles de presse. Constantin Simonov, correspondant de guerre de L’Étoile rouge (Kranaja zvezda), publie une série d’articles intitulée « Camp  d’extermination » dans la Pravda les 10, 11 et 12 août, et diffusée parallèlement à la radio soviétique, où il décrit l’indicible.

Evgueni Kriger, dans les Izvestia du 12 août 1944, qualifie ainsi le lieu :

« [Une] usine de la mort, ce qui le distingue de tous les autres camps allemands de prisonniers de guerre et de prisonniers que nous avons vus jusqu’à présent en trois ans de guerre. […].

Des gens y ont été gazés et tués sans distinction de nationalité, de religion, de conviction, de sexe et d’âge… […]

En 1943, il s’agissait de Russes, Français, Serbes, Hollandais, Juifs, Polonais, Grecs, etc. »

Contrairement à ce qu’il se passera à Auschwitz, les autorités soviétiques laissent les correspondants étrangers pénétrer dans le camp. Alexandre Werth est l’un d’eux, envoyé par la BBC et le Guardian, et qui ne parvient à convaincre la presse britannique de l’authenticité de ce qu’il vient de voir :

« La radio britannique ne voulut pas le [l’article] diffuser, croyant à une grossière propagande soviétique.

Il fallut attendre la découverte (à l’Ouest) de Bu...

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