Chronique

« Viva a França » ? La triste Grande guerre du corps expéditionnaire portugais

le par

Arrivée des troupes portugaises dans les tranchées, Excelsior, juin 1917 - source : RetronNews-BnF

Accueilli par la presse française à grand renfort de clichés essentialistes, un petit régiment portugais part combattre du côté de l’Entente à la fin de la Grande Guerre. Il s’apprête à connaître l’enfer.

Le 9 mars 1916, tandis que la Première Guerre mondiale bat son plein en Europe, l’Allemagne déclarait la guerre au Portugal.

Pourquoi donc ? Parce que le Portugal venait de saisir l’ensemble des navires allemands réfugiés et amarrés dans ses eaux, un casus belli voulu par la France et la Grande-Bretagne qui n’avaient eu de cesse de faire évoluer la diplomatie du pays vers l’Entente.

À Paris, on attendait cela depuis 1914. On exigeait du Portugal, pays neutre, qu’il se saisisse des navires allemands internés dans les eaux portugaises, afin de, pourquoi pas, en faire cadeau à la marine marchande française, durement éprouvée.

Pour Le Matin, citant son confrère britannique The Times, c’était dans cette « prise » que résidait toute l’utilité potentielle d’une entrée en guerre du Portugal :

« À part cela, l'apparition parmi les alliés de ce nouvel ennemi de l'Allemagne n'aura pas beaucoup d’effet. »

Si la presse parisienne peut ainsi disserter à l’envi sur ce que doit faire ou non la diplomatie portugaise, c’est parce que le Portugal est lié par un traité ancien (1703, aux racines plus anciennes encore, 1193 !) qui en fait un obligé des Britanniques. De fait, dès le mois d’août 1914, la République portugaise avait fait savoir qu’elle était prête à entrer en guerre, tout en demeurant neutre.

Interloqué, le Reich avait sommé le Portugal « d’adopter une position définie ». L’enjeu portait également sur les colonies africaines allemandes, jouxtant les colonies portugaises, où l’insaisissable Von Lettow-Vorbeck menait la vie dure aux Britanniques.

À l’annonce en mars 1916 de la déclaration de guerre allemande suivant le refus portugais de lui restituer ses navires capturés, la presse française exulte.

Les rédactions françaises se prennent dès lors de passion pour ce nouvel allié, un « ami de la France ». À Paris, on s’était déjà entiché des volontaires portugais s’étant engagés dans l’armée française, et, comme de bien entendu, p...

Cet article est réservé aux abonnés.
Accédez à l'intégralité de l'offre éditoriale et aux outils de recherche avancée.