Écho de presse

Il y a cent ans : L’assassinat de Pancho Villa

le 20/07/2023 par Michèle Pedinielli
le 23/12/2017 par Michèle Pedinielli - modifié le 20/07/2023
Le général Pancho Villa, victorieux chef des forces constitutionnelles du nord du Mexique, Agence Rol - source : Gallica-BnF

Le général Francisco « Pancho » Villa est assassiné le 20 juillet 1923 à Parral, au Mexique. C’est l’occasion pour la presse française de faire le portrait de ce « pittoresque Mexicain ».

Lorsque la nouvelle de l’assassinat de Pancho Villa près de Chihuahua (Mexique) tombe dans les rédactions françaises en juillet 1923, les informations sont peu claires. On annonce tout d’abord qu’il a été assassiné par balle par son secrétaire, avant de revenir sur l’information :

« D’après les informations officielles, l’ancien chef révolutionnaire, son secrétaire, Miguel Trillo et leur escorte ont été attaqués en se rendant de Canutillo, où se trouve le ranch ou ferme de Villa, à Parral.

Le général Villa, son secrétaire et trois membres de l’escorte ont été tués sur le coup. »

Cette nouvelle ne fait pas les gros titres en France, mais certains journaux tirent tout de même le portrait du général Pancho Villa (peut-être afin d’éviter toute ambiguïté avec le boxeur philippin du même nom devenu champion du monde poids mouche au mois de juin précédent…)

Pour L’Homme libre, c’est « un Mexicain et une des plus curieuses figures, à la fois de bandit et d’aventurier, qui se soient jamais rencontrées ».

« Fils d'esclave agricole, ayant connu, durant toute son enfance, la plus intolérable misère, il s'échappa de chez ses « employeurs » et parcourut le pays, vêtu de haillons sordides, tatoué et ne possédant qu'un maigre cheval. 

Ayant recruté des compagnons parmi les pires éléments de la population, il en fut vite le chef et se fit remarquer par ses exploits séditieux, pillant les riches fermiers, rançonnant les voyageurs, razziant le produit des récoltes. »

Pillages, enlèvements, exactions en tout genre… la presse parisienne dépeint un bandit de grand chemin semant la terreur à la tête de centaines d’hommes.

Pour La France, « le général Pancho Villa était un métis, trop connu pour sa cruauté, qui avait tenu la campagne contre tous les présidents reconnus du Mexique ».

Seul Le Temps évoque les révolutions mexicaines dans son article du 22 juillet, donnant crédit au général Francisco « Pancho » Villa d’avoir transformé sa « bande ».

« Une véritable armée contre laquelle eut à lutter, dans le nord du Mexique, le feu président Carrenza. […]

Il prétendait n’avoir d’autre ambition que de libérer les péons, attachés comme des serfs à la glèbe, et de leur assurer la terre qu’ils travaillaient. »

Nul journal ne parle de la lutte de Pancho Villa contre le général Huerta, président autoproclamé du Mexique après un coup d’État en février 1913. Nul ne parle non plus de sa victoire, à la tête de sa « Division del Norte », à Ciudad Juarez en septembre de la même année.

Nul rappel non plus des armées paysannes de Villa qui avec celle d’Emiliano Zapata, prennent Mexico et s’installent au Palais national, siège du gouvernement, le 6 décembre 1914.

À l’époque, quelques dépêches indiquaient simplement que « M. Guttierrez, président provisoire du Mexique, accompagné des généraux Villa et Zapata, s’est installé officiellement hier dans la capitale. Une nouvelle révolution vient d’éclater au Mexique ».

Au même moment, Le Journal des débats politiques et littéraires constatait, perplexe :

« Le ministère des affaires étrangères de Washington vient de publier un avis dans lequel il annonce que les communications entre Vera-Cruz et Mexico sont interrompues pour un temps indéfini.

Il semble que le Mexique ait maintenant trois présidents ; le général Carranza à Vera-Cruz, le général Zapata à Mexico et le général Villa quelque part au nord de Mexico. »

Les articles amnésiques à la mort de Villa oublient donc son passé révolutionnaire pour ne voir en lui qu’un peon armé qui avait défié le gouvernement de son pays et au-delà, le voisin yankee.

Quelques articles évoquent ses « incursions sur le territoire des États-Unis » : en mars 1916, les troupes de Pancho Villa attaquent Columbus (Nouveau-Mexique) et y incendient plusieurs immeubles. Ce raid qui fit plus d’une centaine de morts au total reste la seule invasion du territoire nord-américain par une armée étrangère à ce jour.

La réplique ne se fait pas attendre et les États-Unis partent en guerre contre Villa. En vain.

« Une armée américaine, commandée par le général Pershing, fut même envoyée de l’autre côté de la frontière, ayant mission de le capturer coûte que coûte. Mais elle dut revenir, après plusieurs semaines d’escarmouches et de vaines recherches, sans y avoir réussi. »

Le général Pershing et ses 10 000 hommes (dont le futur général Patton) n’auront donc pas raison de Pancho Villa.

Huit ans plus tard, c’est un contrat de 50 000 pesos lancé par le nouveau président mexicain Alvaro Obregon qui met un point final aux actions de Pancho Villa. Sa voiture est criblée de balles alors qu’il quitte la petite ville de Parral. L’attentat est revendiqué par Jesús Salas Barraza, un député mexicain qui sera rapidement amnistié.

L’histoire pourrait s’arrêter là car la légende est déjà en marche. Mais un ultime rebondissement ravive le souvenir de Pancho Villa : en 1926, sa tombe est profanée, sa tête détachée de son corps et emportée.

On a toujours soupçonné le milliardaire William Randolph Hearst, qui détestait Villa, d’avoir été à la manœuvre.