Écho de presse

Lorsque les Poilus imaginaient l'après-guerre

le par

« La tranchée », estampe de Félix Vallotton, 1915 - source : Gallica-BnF

À mesure que la Première Guerre mondiale s'éternise, les soldats ne se demandent plus qu'une chose : quand prendra-t-elle fin ? Dans leurs journaux de tranchée, ils imaginent et mettent en scène l'après-guerre.

Commencée en juillet 1914, la guerre devait être courte. En devenant guerre de position, elle va en fait s'éterniser. Pour les Poilus qui combattent en première ou seconde ligne, une préoccupation va alors dominer toutes les autres : savoir quand le conflit prendra fin.

 

Dans leurs journaux de tranchées, beaucoup choisissent de rire de cette question lancinante. En août 1916, ce rédacteur du Front s'amuse ainsi du fantasme de retour à la vie normale que partagent tous les soldats :

« Oui-dà !... messieurs les Poilus qui réclamez la fin de la guerre, croyez-vous que la vie sera si rose, après ? Avez-vous songé un instant aux vicissitudes sans nombre qui suivront votre retour, même après avoir passé sous l’Arc de Triomphe ? […]

 

Après avoir été le Poilu fêté, le héros choyé, vous redeviendrez l’infâme civil que la belle-mère eng...uirlande de ses boniments saugrenus [...]. Quant à vous, jeunes Poilus qui ignorez ce que c’est que d’entendre piailler un moutard et avez le bonheur de n’être pas embellemer... (oh pardon !) vous n’êtes pas au bout de vos peines.

 

Même après la Victoire, il vous faudra soutenir un nouvel assaut, très dissemblable de ceux dont vous êtes sortis vainqueurs : l’attaque du Poilu par ces Demoiselles à marier. Vous aurez à subir leurs œillades assassines, bien malin si vous échappez à leur cour enflammée ; les gaz suaves et autrement captivants que ceux des Boches, vous feront tourner la tête et une fois pris dans les fils de fer barbelés amoureux, il ne vous restera plus qu’à crier : “Kamarad !”.

 

Êtes-vous convaincus, messieurs les Poilus ?... Je vous conseillerai même de mettre un frein à votre ardeur pour n’être pas trop tôt... vainqueurs ! »

Le retour à la paix, en effet, est d'autant plus désirable que pour beaucoup de jeunes soldats, il correspond aux retrouvailles longuement espérées avec la famille ou avec la bien-aimée (parfois fantasmée). Certains journaux de tranchées publient même des petites annonces matrimoniales, ainsi L'Anticafard en janvier 1915 :

« Jeune fille blonde, physique agréable, 22 ans, ayant situation administrative (P. T. T.), désire mari...

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