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1935 : Benito Mussolini interviewé par Titaÿna

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Mussolini au balcon de l'Hôtel de ville de Crémone, Agence Rol, 1922 - source : Gallica-BnF

Le 20 mars 1935, la célèbre grande reporter Titaÿna rencontre le « Duce » Mussolini, dans un contexte diplomatique extrêmement tendu. Six mois plus tard, l'Italie fasciste envahira l’Éthiopie.

Ce n'est pas en qualité de simple journaliste que la star de reportage Élisabeth Sauvy, dite Titaÿna, rencontre le « Duce » au début de l'année 1935. C'est plutôt, selon l'impétueux chef d’État italien, une façon de « récompenser » le courage dont elle a su faire preuve quelques jours plus tôt. En effet la semaine précédente, la reporter interrogeait en Crète le grand homme politique grec Elefthérios Venizelos. Cependant, à l'occasion de ce voyage, elle s'est fait tirer dessus à la mitrailleuse. Mussolini a eu vent de ce reportage pour le moins musclé et consentit dès lors à recevoir la journaliste.

Titaÿna dévoile le lendemain dans Paris-Soir le contenu de cet entretien. Bien que Mussolini affirme ne pas pouvoir donner la moindre interview, puisque « trop de questions sont en ce moment sur le "tapis" », la journaliste réussit à obtenir de lui des propos exclusifs – et lunaires – qui révèlent l'univers mental particulier du fondateur du fascisme.

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Une visite à Mussolini

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« Avant tout il faut bâtir la paix, mais pour la bâtir il faut des peuples jeunes et forts. La démographie est la clé de l’histoire du monde. »

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« LES PEUPLES FORTS SONT CEUX QUI AURONT BEAUCOUP D’ENFANTS. LA DÉNATALITÉ EST UNE DES CAUSES DE LA CRISE. L’ENFANT EST UN CONSOMMATEUR : IL DÉTRUIT TOUT. »

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« La politique est dépassée par la technique, mais la technique doit être soumise à la politique »
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« Croire qu’un peuple nombre devient un peuple pauvre est une monstrueuse erreur »

 

« Chaque homme doit garder sa part de barbarie et vivre fortement »
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« Je suis féministe, mais les femmes ne doivent toucher ni à la philosophie, ni à l’architecture, ni à la musique »

(De notre envoyée spéciale TITAYNA)

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Rome, 20 mars (Par téléphone)

Mussolini, à ces moments de paix européenne troublée, ne reçoit pas de journalistes. Seuls les diplomates ont droit de le voir. Jusqu’à 10 heures le soir, sa fenêtre du Palais du Gouvernement reste éclairée sur la place de Venise et les passants lèvent la tête vers sa lumière.

– Le Duce travaille.

Et comme chacun a un peu d’angoisse au cœur, les pensées montent avec une puissance décuplée vers la salle où arrivent les télégrammes d’Europe.

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Ce n'est donc pas comme journaliste que j'ai obtenu de voir celui qui porte sur ses épaules les décisions d'un peuple à une heure o...

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