Interview

Guerre d’Espagne : l’interview de Franco pour le Journal

le par

« Huit jours chez Franco », Le Journal, 10 juin 1937 – source : RetroNews-BnF

En juin 1937, celui qui n'est encore que le chef des armées nationalistes, Francisco Franco, est interviewé par Le Journal. Un échange étonnamment conciliant, excessivement complaisant, qui vise avant tout à rassurer la France sur les intentions de l'armée espagnole à son encontre.

Le 17 juillet 1936 marque le début de la guerre civile espagnole, avec le coup d’État nationaliste contre la seconde République espagnole. Le général Francisco Franco n'en est pas l'instigateur. Cependant, au décès de José Sanjurjo, le général à l’origine du soulèvement, il prend la tête de l'insurrection militaire. Ce n'est qu'au début de l'année 1938, le 30 janvier, que le général est proclamé « Caudillo », chef du gouvernement et des armées.

Presque un an après le début de la guerre, en juin 1937, le grand reporter Édouard Helsey, de son vrai nom nom Lucien Coulond, interview le futur dictateur. Cet entretien, d'une immense complaisance vis-à-vis du camp nationaliste, est publié dans Le Journal du 10 juin 1937.

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Huit jours chez Franco

“Dites à la France…”

« Notre confiance est complète et chaque jour les événements la renforcent. »

« Quand nous aurons libéré l’Espagne nous aurons chez nous une tâche assez vaste pour requérir notre activité. »

« C’est là tout notre impérialisme. »

« JAMAIS L’ESPAGNE DE FRANCO NE PRÊTERAIT LES MAINS A UN COMPLOT CONTRE LA FRANCE »

AINSI PARLE LE CHEF DES ARMÉES NATIONALISTES A NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL Édouard HELSEY

SALAMANQUE, juin. – Après bientôt onze mois de guerre civile, le général Franco occupe solidement les deux tiers du territoire espagnol : 346.000 kilomètres carrés sur un total de 533.000. Sur une population de 22 millions d'habitants, il en gouverne les deux tiers : près de 13 millions. La situation militaire semble tourner très nettement à son avantage. Il se croit sûr de devenir avant peu maître de tout le pays.

Il n'est plus possible aujourd'hui de prendre à la légère un mouvement d'une telle ampleur. Quelque préférence de doctrine ou de sentiment que l'on veuille professer pour l'un ou l'autre des belligérants, on ne saurait, désormais, raisonnablement négliger de connaître les intentions véritables d'un homme appelé, en tout état de cause, à jouer dans les affaires européennes un rôle de premier plan.

Où va Franco ? Que pense-t-il des grands problèmes à l'ordre du jour et, spécialement, de l'avenir des relations hispano-françaises ? Je suis allé le lui demander à lui-même, catégoriquement, dans son Q. G. de Salamanque.

***

Avant de m'accorder la longue entrevue que je souhaitais, le général Franco a voulu me mettre en contact avec quelques-uns de ses plus proches collaborateurs.

Sur l'origine du mouvement, sur la situation présente, sur les projets de profondes réformes qu'élabore activement le général, sur l'Espagne nouvelle qu'il entend construire, j'ai recueilli d'amples explications que j'exposerai à loisir aux lecteurs du Journal.

Mais j'ai hâte d'abord de reproduire fidèlement les déclarations explicites que j'ai pu obtenir, en manière de conclusion, du chef du nouvel État espagnol.

Une foule d'officiers étoilés et de hauts fonctionnaires se presse dans l'antichambre. C'est l'heure du rapport. Entre tous, se détache la silhouette légendaire du général José Millan Astray, le créateur du fameux Tercio, l'homme-drapeau, le Don Quichotte à la joue trouée et au bras coupé, naguère le chef immédiat de Franco, aujourd'hui son lieutenant le plus discipliné. Des femmes attendent aussi, porteuses de suppliques et, petits visages pâles et soucieux, deux enfants, un garçon, une fille, venus chercher des nouvelles de leurs parents, captifs dans Madrid.

Une porte s'ouvre. On me pousse en avant. Au bout d'une pièce vaste et claire, un bras se tend vers moi pour le salut romain. Me voici seul, en face du général Franco.

Capitaine à vingt ans

Francisco Franco Baamonde. Le héros de Xauen et d'Alhucemas, le grand blessé du combat de Buit. Quinze ans de bled marocain, toujours en première ligne. Une carrière fulgurante. Fils, petit-fils,...

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