Chronique

L’apparition des petites annonces dans la presse du XVIIIe siècle

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Annonce de représentions de diverses pièces de théâtre, 1776 - source : Gallica-Patrimoine numérique de la ville de Valenciennes

Au siècle des Lumières, se multiplient dans les gazettes des pages où sont regroupées pêle-mêle annonces de spectacles, mises en vente d’objets ou demandes en mariage. Ces « avis » constituent un ancêtre des célèbres petites annonces.

Les « petites annonces », qui peuplent désormais notre quotidien sous la forme de notices de presse, de publications en ligne et d’applications mobiles, connurent un véritable âge d’or au XIXe siècle, dynamisées par le développement des quotidiens de masse à faible coût. Mais leur émergence précéda pourtant ce « siècle de la presse » : parallèle à celui du livre, des placards et autres canards, cet essor peut même être considéré comme l’un des piliers d’une série de dispositifs qui contribuèrent à structurer le marché de l’information et accompagner l’extension de l’espace public à l’époque moderne.

Le XVIIIe siècle connut une première généralisation de ce modèle éditorial à l’échelle occidentale. L’Allemagne se couvrit, entre 1720 et la fin du siècle, de presque deux cents feuilles d’avis (Intelligenzblätter), à la fois utilitaires et morales ; de même l’Angleterre accueillait, outre le Daily Gazeteer et le London Daily Advertiser, des titres régionaux d’importance consacrés parfois jusqu’aux trois quarts aux petites annonces, tandis que le phénomène prenait de l’ampleur en terre coloniale avec le Boston News-Letter ou le New York Mercury.

Des annonces de spectacles aux objets trouvés, des recensions de livres aux emplois à pourvoir, ces feuilles frappent par l’ampleur de leur domaine de compétence. Le discours s’y arrêtait le plus souvent au seuil de la politique, sans s’interdire toutefois les remarques humoristiques sur les pays voisins. Ainsi du Censor de Madrid, en 1781, qui faisait figurer dans sa rubrique d’objets perdus l’annonce :

« Article : la capacité des rois de France à soigner les écrouelles. L’ampoule sacrée de Reims authentique. […] Et autres documents variés, appartenant à la gloire de la nation française et à l’ancienneté de la foi qui y règne.

Que les personnes en possession de ces articles s’adressent aux différents intéressés. »

En France, les premiers jalons d’une presse d’annonces furent posés au XVIIe siècle par Théophraste Renaudot, fondateur dans les années 1630 d’un « Bureau d’adresse » chargé de centraliser les annonces professionnelles, et de la Gazette. L’expérience ne dura pas, dénoncée comme une concurrence déloyale par les Six Corps de marchands de Paris, tandis que la Gazette, dont Richelieu perçut l’intérêt politique, se transforma avec le temps en « Organe officiel du Gouvernement royal ».

Dans le premier XVIIIe siècle, c’est donc sur les murs, sous la forme d’affiches et de placards, que s’épanouirent les petites annonces, parfois réimprimées sous forme de volume. Les Affiches de Paris, des provinces et des pays étrangers (1716) livraient ainsi sous ce format portatif un recueil des affiches glanées sur les murs de la capitale et de quelques autres villes, relatives aux objets les plus divers : informations ecclésiastiques, juridiques ou scientifiques, annonces de spectacles, mais aussi objets trouvés, nouveaux remèdes, inventions mécaniques, « ventes d’Offices, de Terres, de Maisons, de Meubles, de Bibliothèques, de Cabinets, de Tableaux, de Bijoux, etc. ».

Il fallut donc ...

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