Écho de presse

« Je suis le véritable Père Duchesne, foutre » : le journal le plus virulent de la Révolution

le par

Jacques-René Hebert, unique rédacteur du journal révolutionnaire « Le Père Duchesne », gravure d'Edme Bovinet, 1796 - source : WikiCommons

De 1790 à 1794, Le Père Duchesne, feuille pamphlétaire créée par Jacques-René Hébert, eut un succès populaire considérable. Son credo : un style truculent et des attaques ordurières contre le roi, le clergé, les aristocrates, les modérés et les « traîtres » à la cause révolutionnaire.

De tous les journaux nés pendant la Révolution française, Je suis le véritable Père Duchesne, foutre fut sans doute le plus lu. Le plus cru et le plus ordurier, aussi : imaginé en septembre 1790, il fut la création d’un homme, Jacques-René Hébert, né à Alençon en 1757, qui avait eu l’idée géniale de rédiger un journal écrit entièrement dans la langue des faubourgs.

Dès le premier numéro, Hébert reprend à son compte le personnage du Père Duchesne, un réparateur de fourneaux imaginaire inventé dans les foires du XVIIIe siècle et toujours prêt à dénoncer les injustices. Sous cette signature (qu’il ne sera pas le seul, pendant la Révolution, à utiliser), le journaliste s’attaque inlassablement au clergé, aux aristocrates, aux monarchistes, aux « faux patriotes ».

Tiré tous les trois jours, chaque numéro ne comporte qu’un seul article et paraît sur huit pages. A chaque fois, Hébert parsème ses invectives d’innombrables « foutre » et « bougre » qui deviendront sa marque de fabrique. « Ma langue naturelle est celle de la sans-culotterie. Il faut jurer avec ceux qui jurent, foutre ! », écrira-t-il.

Dans des saynètes inspirées du théâtre populaire, Hébert multiplie les attaques personnelles, souvent racontées sur le mode de la farce. Dans le numéro 5, il se vante par exemple d’avoir passé à tabac l’abbé Maury (élu député du clergé aux États généraux de 1789), et raconte par le menu l’altercation :

« Nous suivons l’abbé qui continue sa route en grommelant comme un foutu matou, à qui l’on fout les pattes dans la braise. J’avais tout bas instruit mes camarades.

Au détour d’une rue, vis-à-vis la boutique d’une fruitière, l’abbé est saisi par mes trois lurons, l’abbé crie, la fruitière accourt à sa porte ; qu’est-ce que c’est ? L’abbé Maury à qui nous voulons foutre le fouet... C’est vous, père Duchesne ? Bravo, fessez fort [...].

L’abbé jurait, criait et se débattait, et moi l’exécuteur des hautes-œuvres je l’exhortais à la soumission en lui disant, demande excuse à la nation, coquin, fais beau cul et tu n’en n’auras guère. »

Le Père Duchesne laisse régulièrement éclater sa « joie », sa « colère » ou son « indignation » sur diverses questions politiques et sociales : dans le numéro 25, paru fin 1790, il s’élève ainsi contre « l’indi...

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