Extrait du journal

L’idée d une paix séparée de PEntente avec la Turquie est née avec plus ou moins de précision dans beaucoup d’esprits occidentaux de l’impression produite par les développements de la révolution russe. Celle-ci marche sur les nuages, elle croit avoir ouvert pour le monde entier une ère nouvelle de fraternité humaine dans laquelle tout ce qui a été jugé jusqu’ici nécessaire à la vie nationale va devenir désuet et superflu : appliquant cette conception à la Russie, elle se désintéresse de Constantinople et des Détroits. Allons-nous être plus Russes que les Russes, poursuivre pour eux, sans eux et même contre leur sentiment, des objets dont ils ne veulent plus? Si la Russie nouvelle renonce à la revendication des débouchés de la mer Noire, si fermement formulée en 1915 par le gouvernement du tsar, c est-à-dire si la Turquie n’est plus menacée de perdre Constansinople, ne pouvons-nous faire la paix avec cette puissance? Après tout nous n avions aucune querelle en 1914 avec l’Empire ottoman. Nous ne lui demandions rien ; bien plus, nous étions fidèles à notre vieux dogme de son intégrité que la France et l’Angleterre, entraînant la Russie dans cette politique qui unissait pour la première fois en Orient les antagonistes de la guerre de Crimée, proposaient formellement à la Turquie de lui garantir son intégrité si elle n’entrait pas dans le conflit déchaîné par les Empires du Centre. Même plus tard, si l’Angleterre et la France ont pu envisager quelles elles avaient quelque chose à prendre à l’Empire ottoman, c’était pour répondre à la situation nouvelle que leur ferait un démembrement beaucoup plus grave que les précédents, puisqu’il installerait la Russie à Constantinople. Mais si la Russie nouvelle renonce aux revendications que la folie des gouvernants de Constan-...