Extrait du journal

Je représente ici l'austère figure du censeur de la cinématographie, mais si j'ai une crainte, c'est celle de ne pas trop vous effrayer, peut-être même de ne pas vous effrayer assez, car vous l'avouerez, la censure, quoi que vous en pensiez, n'a jusqu'à présent rien de bien exigeant. Je représente aussi cette ville à laquelle faisait allusion tout à l'heure mon.- voisin de gauche, de Lyon qui a vu créer le premier cinémato.graphe. Nous J")mmes ici plusieurs à nous en souvenir, mais je suis le premier à ne pas avoir oublié notre émotion lorsque, un certain jour, il y a déjà longtemps, nous avons appris que pour la première fois, la représentation des images en mouvement avait été fixée par les procédés de MM. Lumière. Et enfin, mon jeune confrère, mon dernier titre à être ici, c'est que je représente les victimes du cinématographe, ceux que les devoirs de votre profession, dont le premier est l'indiscrétion, amènent à faire passer devant leurs appareils, de façon à permettre le contrôle non seulement de leurs actes, mais de leurs gestes ! Mais, au nom de ces victimes, je viens vous féliciter et vous remercier ; je viens vous dire, de la part d'un gouvernement où je joue le rôle modeste du maître d'école, l'importance et l'intérêt que j'attache à vos projets. On a dit tout à l'heure que le cinématographe était une des formes de l'art : j'y consens d'autant mieux que je me souviens que ce mot a été dit par un de nos meilleurs amis, dont j'ai conservé la mémoire, Canudo, aussi excellent compagnon qu'il avait été brave combattant....