PRÉCÉDENT

Gazette nationale ou le Moniteur universel, 18 janvier 1848

SUIVANT

URL invalide

Gazette nationale ou le Moniteur universel
18 janvier 1848


Extrait du journal

La société de géographie a tenu sa séance générale le 14 de ce mois ; le discours suivant a été prononcé par M. le comte Molé : « Messieurs, « Vos suffrages m’ont pénétré de reconnaissance; je me sens fier et touché de voir mon nom inscrit sur cette liste d’hommes illustres qui ont été appelés à vous présider. En remarquant parmi eux plus d’un personnage politique, j’ai cru comprendre votre pensée. Nous vivons dans un temps où la science elle-même ne peut s’isoler de la grande association civile et politique. Il n’est plus donne à celui qui se voue à son culte de se renfermer dans des méditations solitaires. On attend de ses veilles et de ses vives lumières quelque chose qui ajoute au bien-être, à la grandeur, à la prospérité de tous. Plus que jamais vous avez dû croire que les hommes d’Etat ne pouvaient se méprendre sur l’importance de vos tra vaux et l’utilité de vos services. Sous ce rapport, du moins, je justifierai votre choix. Ce n’est pas moi, assurément, qui demanderai quel profit, quels avantages le pays est en d:oit d’attendre de vous. N’est ce pas vous qui encouragez le zèle et le dévouement de ces hardis voyageurs, qui sont comme les éclaireurs de notre commerce, de notre navigation, que 1 dis-je, de la civilisation elle-même? N’est-ce pas vous qui réunissez en faisceau, qui faites aboutir à un centre commun tant d’efforts et d’entreprises suggérées par des motifs et un but si différents. La science ne s’enrichit pas seulement au moyen de ces voyages qui lui sont particulièrement dé. 'lies, et dont les gouvernements font magnifiquement les frais. Elle ne profite pas moins de ceux qui sont librement commencés, cl inspirés par cette passion, que l’homme ap porte parfois en naissant, de connaître, d’explorer ce globe sur lequel il est placé. Comme le grand Christophe Colomb, il se sent alors entraîné vers des cieux inconnus; nul obstacle ne l’arrête, il brave mille morts pour atteindre des rivages qu’il ignore, mais que lui révèle je ne sais quelle conscience mystérieuse cl sûre. Tantôt c'est le géologue, le botaniste, le naturaliste, qui poursuit, à traveis les privations et les dan gers, des conquêtes dont la science qu’il cultive lui fait sentir le prix, et qui recueille en passant des faits , des observations qui agrandissent la vôtre. Parlerai-je du plus sublime des voyageurs, du missionnaire chrétien, auquel la géographie et l’humanité tout entière ont dù tant de découvertes et de pro grès ! Vous ne voulez pas non plus que j’oublie une autre sorte de voyageurs, un autre ordre d’esprits avides de con naître les nouveaux espaces que vous ouvrez à leurs regards: je veux parler de ceux qui sentent la nature plus quNls ne 1 étudient. Aidés par le fil que vous remettez dans leurs mains, ils aiment a pénétrer dans ces solitudes reculées qui ont encore leur physionomie native, parce que l’industrie humaine n’a pas commencé à les exploiter. « Ceux-là, messieurs, ne rapportent de leurs courses les plus aventureuses, les plus lointaines, que des trésors d’émo tion et de poesie. Devons-nous le leur reprocher? L’univers ne resterait-il pas imparfaitement connu, si, à côté de ceux qui i expliquent, ne se trouvaient ceux qui le contemplent'* Les merveilles de la nature étonnent et confondent la science qui s’efforce de les approfondir; mais elles ne se reflètent avec toute leur grandeur que dans l ame qu’elles remplissent d’admiration et de plaisir. Que la poésie et la science fassent donc ensemble une étroite alliance. C’est dans leur intime union que se trouve l'homme tout entier. Grâce aux progrès des lumières, on ne les voit plus se reléguer dans des camps séparés et presque ennemis. Politique, industrie, science et poesie, sources diverses et abondâmes de richesse et de civili sation, qui se réunissent aujourd’hui et se confondent dans une grandeur commune. Un prince, objet de nos inconsola bles regrets, et qui trouvait en lui-même toutes les pensées grandes et généreuses, avait ainsi compris notre sociabilité nouvelle. 11 vous l’a bien prouvé, messieurs, en fondant ce prix que vous n’avez pu donner encore, et qui est réservé au voyageur qui fera l’importation la plus utile à notre agricul ture, à notre industrie ou à l’humanité. « Votre société, qui compte déjà plus d’un quart de siècle d existence et tant de laborieux travaux, a adopté plus qu’auc uni autre ce principe d association de toutes les forces intel lectuelles au profit de tous. La science que vous représentez vous met en rapport avec tous les intérêts de la société; elle est un des flambeaux de l’histoire; la science économique à tous mo ments l’interroge; la statistique ne peut se passer d’elleenfin, les sciences naturelles ou exactes lui demandent inces samment son concours. Votre modestie est égale à votre im portance. Vous ne vous laites connaître que par vos services et vous savez attendre la justice, tout en n’épargnant rien pour la mériter. »...

À propos

Fondé en 1789 par Charles-Joseph Panckoucke (1736-1798), éditeur de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, La Gazette nationale ou Le Moniteur universel fut pendant plus d'un siècle l’organe officiel du gouvernement français.

En savoir plus
Données de classification
  • bizot
  • marre
  • carpentier
  • glandaz
  • bousquet
  • bessin
  • lecocq
  • bryon
  • harmand
  • dubois
  • paris
  • bordeaux
  • peyre
  • marseille
  • europe
  • lyon
  • munich
  • vaise
  • berlin
  • agen
  • cour de cassation
  • union
  • o. i
  • imprimerie royale
  • a. c.
  • collège henri iv
  • colas
  • orange