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Gazette nationale ou le Moniteur universel, 2 mai 1848

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Gazette nationale ou le Moniteur universel
2 mai 1848


Extrait du journal

Rapport fait au Gouvernement de la République, par le membre du Gouvernement provisoire, ministre des finan ces, sur la néccsssité de créer l'unité des banques. Citoyens, Le but de la République, c’est l’amélioration morale et matérielle du sort du peuple. Pour augmenter le bien-être général, il faut augmen ter la masse des richesses et répartir ensuite cette pro duction nouvelle, suivant les lois de l'équité. Le plus énergique moyen d’accroître la richesse, c’est le développement du crédit. Donc, le principal devoir du Gouvernement de la Ré publique, c’est d'organiser le crédit sur une large et forte base. Comme toutes les institutions humaines, le crédit se développe suivant une loi générale. Sorti de I intelligence individuelle, il grandit pa: l’associalion et trouve sa con sécration définitive dans le concours de la puissance pu blique. Les conditions nécessaires de l'existence du crédit, pu blic ou prive, sont maintenant connues. Les utopistes seule et les songe-creux de la finance ignorent encore que la multiplication indéfinie des instruments, des signes du crédit est de toutes les impossibilités la plus radicale ; qü une valeur de crédit n’est une valeur réelle que sous la condition expresse de représenter un objet existant et toujours échangeable : marchandise, espece, meuble ou immeuble. Le crédit ne crée pas instantanément le capital. Il mobilise le capital préexistant, le rend transmissible, le féconde et le reproduit. Un billet sort d’un établissement de crédit : que vautil ? ce qu’il représente dans l’opinion de ceux qui le re çoivent ; ni plus, ni moins. Si, en réalité ou dans l’opi nion, il ne représente rien, il ne vaut rien. De là suit que la multiplication des valeurs de crédit par delà la somme totale des richesses actuellement ou prochainement réa lisables n’est qu’une illusion. En les créant, on ne crée que des chiffons de papier noirci. Une expérience récente, encore visible, découvre clai rement la vérité de ce que j’avance. Au moment où la ré volution a éclaté, la situation était celle-ci : Depuis long temps l’esprit de spéculation avait multiplié outre mesure les effets de commerce et les valeurs industrielles de toute sorte ; si bien qu’une masse énorme de « es titres ne re présentait plus qu un capital fictif. Les circonstances ayant nécessité une liquidation subite, ces valeurs qui ne reposaient que sur une illusion, tout au plus sur une espérance, n’ont pu être échangées contre une valeur réelle. Nécessairement alors elles ont subi une déprécia tion considérable ; et beaucoup d'entre elles ont été dé truites, ont disparu. Quand cette déperdition de valeurs dépasse une certaine limite, c’est la banqueroute. En deçà, ce n’est qu'une crise plus ou moins forte. Nous avons évité la banqueroute ; j’ai la certitude que nous n'y tomberons pas. Mais la crise qui était depuis longtemps ouverte s’est assez aggravée, elle a été assez redoutable pour occuper toute la sollicitude du Gouver nement provisoire. Quand j'ai pris en main la {gestion des finances de la République, la situation se présentait sous ce double as pect : l’engorgement des portefeuilles, l’encombrement des magasins. Les anciens intermédiaires du crédit ayant disparu, les commerçants et les industriels ne possédaient plus aucun moyen d escompter les valeurs dont ils étaient nantis; et, d’un autre côté, ils ne pouvaient échanger leurs marchan dises contre de l’argent, parce que la consommation avait été largement réduite, et même, sur un grand nombre de points, complètement suspendue. Pour rendre la vie à ces valeurs inertes, il fallait les mobiliser. Nous y avons pourvu, en ce qui concerne les marchandises, par l’étublissementdes magasins généraux, dont vous connaissez aujourd hui le mécanisme. Quant aux effets de portefeuille, deux moyens se pré sentaient : nous pouvions relever par une assistance di recte les intermédiaires antérieurs du crédit ; nous pou vions en créer de nouveaux. En admettant que le premier mode fût possible, il comportait incontestablement des périls sérieux. Au point de vue financier comme au point de vue politique, et ceci est une considération sur laquelle je n insisterai pas, j’ai pensé que la sagesse commandait de ne relever aucune des puissances que la monarchie entraînait dans sa chute. J’ai pensé qu il valait mieux, de tous points, sous tous les rapports, en vue de toutes les éventualités, créer une in stitution nouvelle qui recevrait du concours de nos nou velles institutions politiques; une puissante faculté d ex pansion. De là la création des comptoirs d’escompte, qui, résumant en soi le triple concours des individus, des com munes et de 1 Etat, démocratise le crédit, en substituant la tutélaire impartialité de la puissance publique aux égoïs tes conseils de la puissance individuelle. Ce que deviendra cette institution, ce qu’elle produira dans l’intérêt du peuple ; de quelle manière elle devra sc compléter pour venir efficacement au secours de l’agri culture et pour commanditer les associations volontaires des travailleurs, c’est-à-dire pour fonder pacifiquement la véritable organisation du travail, l’avenir le dira dans peu. Je me borne à observer, à constater que le cadre est assez large pour contenir toutes les applications vraiment utiles, et assez nettement tracé pour que les vagues élans de l’esprit de système n’y viennent point chercher leur place. Mais, en dehors de celte grande institution, préexistaient d’autres établissements de crédit : les banques. Ces éta blissements étaient au nombre de dix ; labanque de France, à Paris ; les banques de Lille, d’Orléans, de Marseille, de Lyon, de Nantes, de Rouen, du Havre, de Bordeaux, de Toulouse, Quelque opinion que l’on ait sur les principes qui doivent présider à l’organisation du crédit dans une république démocratique, il y a un tait que la justice com mande de reconnaître : ce lait, c’est que les banques, malgré toutes les imperfections qu’on y peut reprendre, ont rendu au pays des services considérables. Voici quelles étaient les bases principales de leur orga nisation. Les banques vivaient d’une vie propre et d’une vie communiquée. Elles étaient à la fois indépendantes et sub ordonnées ; libres, sous une surveillance efficace. Cette indépendance limitée a produit, dans la pratique, les plus...

À propos

Fondé en 1789 par Charles-Joseph Panckoucke (1736-1798), éditeur de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, La Gazette nationale ou Le Moniteur universel fut pendant plus d'un siècle l’organe officiel du gouvernement français.

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