Extrait du journal

Les femmes musulmanes Le rôle de la femme a singulièrement grandi dépuis la guerre. Qu'elle se dévoue dans les ambulancesvet les œuvres chari tables, qu'elle tourne des obus, conduise des tramways ou pousse la charrue,' pur tout sa faiblesse laborieuse s'est ingéniée à remplacer la force absente de l'homme et elle a conquis, avec le respect dû à son courage, l'indépendance de l'être qui se suffit à soi-même, parfois l'autorité que donne le commandement. Nulle part cette transformation de la vie féminine ne s'est fait mieux sentir que dans'les pays musul mans. Riche où pauvre, la femme musulmane n'échappait au joug paternel que pour passer sous la tutelle du mari; soit qu'elle vécût enfermée dans la prison dorée du harem, soit qu'elle suivît à pied, la tête chargée de fardeaux, son époux trottant sur un âne, elle était l'éternelle mineure, asservie au bon plaisir d'autrui. La guerre a changé tout cela. Les journaux d'outreRhin l'ont déjà observé à Constantinople. M. René Paydt, du Journal de Genève, l'a constaté de même en Algérie, à. Tunis, au Maroc. L'Afrique du Nord n'a pas donné seule ment des soldats à la France ; elle lui a fourni 90,000 ouvriers. Quelques-uns, fidè les à l'ancienne coutume/ont bien confié à -leurs, -.-parents le soin-, de surveiller leur maison et leur femme, mais le plus sou vent la veuve temporaire, obligée de pren dre en mains l'intérêt du ménage, d'esclave qu'elle était, est devenue maîtresse du jour au lendemain. Elle dirige Inculture, fait rentrer la récolte, ' vend les produits du jardin et des champs. Pour conclure les marchés, il faut connaître les cours; elle reçoit des journaux. Après les mercuriales, elle consulte les dépêches, si bien qu'au fond des douars la femme musulmane suit la marche des armées et commente les nouvelles comme une Pari sienne le fait dans son salon. La géogra phie lui dévoile ses secrets, elle s'initie à nos usages dont les uns l'attirent et les autres l'inquiètent. M. Pavot a entendu les plaintes d'une amoureuse de Tlemcen qui, apprenant que des damés sont infirmières, et craignant.l'inconstance des hommes, ré clamait le droit de se rendre en France pour pratiquer, elle aussi, « l'assistance morale aux blessés indigènes '».' Aux,produits du travail féminin, s'ajoute tantôt l'argent qu'envoie le mari, ouvrier en France, tantôt l'allocation donnée par le gouvernement à la femme du mobilisé. En 1914, dans la seule commune de FortNational qui compte 738 familles, les hommes attachés à nos usines de guerre ont expédié 3,146,000 fr. L'allocation est la même en Algérie qu'en France et l'auto rité veille à ce qu'aucun intermédiaire ne la vienne détourner. La femme la touche personnellement; en cas de veuvage, elle reçoit aussi la pension tout entière, con trairement au statut religieux qui ne lui en réservait qu'up huitième, et attribuait le reste aux enfants. Indépendante et riche, la femme ynusul mane s'est ' laissé d'abord quelque peu éblouir ; elle a acheté beaucoup de cein tures dorées, de glaces et, de foulards, puis elle s'est habituée à sa nouvelle for tune; elle a appris à l'administrer ; elle est devenue économe et aussi patriote, car elle est reconnaissante à la France dé ce que notre pays a fait, pour son bonheur. « Lors du dernier emprunt, les femmes de La ghouat ont souscrit et fait leur versement en or : à Bou-Saada, la belle Zidanah, danseuse Ouled-Naïl, placardait sur sa porte un bon de la Défense nationale, » /j*...