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Journal des débats politiques et littéraires, 24 mars 1845

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Journal des débats politiques et littéraires
24 mars 1845


Extrait du journal

PARIS; 34 MARS. Le projet de loi sur les douanes, dont la Cham bre a ouvert la discussion aujourd'hui, touche à de grands intérêts du pays; à l'industrie, à l'ad ministration , à la politique. Des changemens sur venus dans la production, l'apparition brusque et sur une grande échelle de produits étrangers tout à fait imprévus, paraissaient indiquer des modifi cations aH tarif. L'équité dans la protection que l'administration doit à toutes les variétés du travail national, à toutes tes propriétés, a été invoquée, particulièrement au sujet de la graine de sésame, qui, des contes orientaux, seuls témoignages de son existence jusqu'à ce jour, est passée dans la réalité des faits sous la forme de quinze à vingt millions de kilogrammes jetés annuellement sur notre marché. Il s'agissait de prendre un parti sur ces réclamations diverses. En troisième lieu , une préoccupation vive a saisi tes hommes d'Etat : La navigation française manque d'ali meus; sans navigation commerciale cependant, comment peut-on être une puissance maritime? Différentes causes d'une influence qu'on dirait ir résistible semblent devoir restreindre encore notre navigation marchande. Les chemins de fer, qu'on a grandement raison de dérouler sur 1e sol français, porteront préjudice au cabotage, car on peut s'at tendre que 1e chemin de Paris à Bordeaux, par exempte, si l'exploitation en est habilement en tendue , ne laissera peut-être pas un tonneau de vin aux caboteurs. La navigation à vapeur, qui, par sa rapidité et par l'intelligente force de ses mé canismes, supplée au nombre des navires , et sur chaque navire à celui des matelots, fera également un vide dans tes rangs de nos gens de mer. Com ment créer, en dépit de ces obstacles, une quantité suffisante de marins ? De toutes les questions qu'on a pu se poser en rédigeant cette loi de douanes, celle-là est probablement, la principale. Enfin des traités de commerce ou des conventions spéciales ont eu lieu, qui sont destinés à nous rattacher par les liens solides des intérêts matériels certaines puissances du second ordre qui nous avoisinent, la Belgique et les Etats sardes notamment : il leur fallait la sanction législative. Passons rapidement en revue ces différens points dans cê qu'ils ont de plus intéressant. Dans l'industrie des machines un événement s'est passé. Celte industrie est en. progrès évident chez nous; la dernière Exposition t'aurait prouvé aux plus incrédules. Mais elle n'est pas stationnaire non plus en Angleterre. Le gouvernement anglais, fidèle à son système d'encourager l'exportation des objets manufacturés que vomissent les immenses ateliers de la Graude-Bretagne , vient d'autoriser la libre sortie des machines. Jusqu'alors, dans la vue de gêner l'établissement des manufactures sur le continent, il l'avait prohibée , pour les métiers du moins. Le fer d'ailleurs, qui est la matière pre mière des machines, est tombé en Angleterre à des prix fort bas, et il y demeurera sauf des va riations peu étendues et passagères. Par ces motifs, les droits actuels n'ont pas paru protéger suffisam ment nos constructeurs. L'assiette même des droits était vicieuse , et donnait lieu à des contestations sans fin. On percevait des droits proportionnels à la valeur ; mais cette valeur, comment l'établir avec quelque certitude? Désormais il n'y a plus sur cet article que des droits au poids. On avait cru d'abord que l'administration se bornerait à substituer purement et simplement, sans aggra vation , tes droits au poids aux anciens droits ad, valorem. Mais pour toutes tes machines autres que les machines à vapeur, elle a jugé indispensable de hausser la taxe protectrice, quoique ce soit toujours chose grave que de renforcer un tarif de douanes. Le gouvernement, assailli par des pro ducteurs qui se plaignent vivement de l'insuffisance de la protection, ne trouve pas un contrepoids valable chez les consommateurs intéressés à ce nue l'ancien droit soit maintenu, et il résiste difficilement, à moins de s'armer d'une volonté énergique tirée du sentiment de l'intérêt public. Les Chambres doivent assister sa volonté de la leur, et ne céder à une demande d'élévation du tarif que par exception et dans les cas de nécessité parfaitement démontrée. La graine de sésame a fourni au gouvernement une occasion de faire ainsi acte de volonté négative, tempérée cependant par une concession. L'huile extraite de cette graine se substitue, daps tes ate liers du Midi, dans les grands établissemens de Marseille, m produit des huileries des départe mens du Nord qui emploient simultanément des graines indigènes et des graines de la Baltique, et...

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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