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L’Écho de Paris, 7 septembre 1897

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L’Écho de Paris
7 septembre 1897


Extrait du journal

dant pas combattre sérieusement pour des raisons politiques et fiscales, cet alcoolisme n'est pas une cause première : c'est, une cause seconde. Il est'né dela victoire du café et du marchand de vin sur la femme et sur la vie d'intérieur. L'ouvrier — car ce n'est que de lui qu'il s'agit et du travailleur des villes; le paysan étant dans des conditions autres — se marie de moins en moins et; marié, vit de moins en moins chez lui. Il a pris le goût d'uri certain luxe, en quoi il a suivi le mouvement général de l'époque : les conditions économiques dans lésquelles il se trouve à la fois par l'augmen tation de ses besoins et le renchérisse ment de toutes choses le poussent à cher cher ce luxe dans les lieux de plaisir. En somme, l'ouvrier fait comme ces cercleux pannes qui logent en de amnisties garnis dont ils doivent le terme et se rattrapent, au cercle, en tutoyant de haut des larbins en culottes que la cagnotte en tretient . Quand il est bon garçon, l'ouvrier emmène sa femme au «beu glant » ou au cabaret, et c'est ainsi que l'alcoolisme atteint la femme même. Qui sait si l'école obligatoire n'a pas con tribué aussi à amoindrir la vie familiale du travailleur ? L'enfant n'est plus à la maison et, par l'absence, s'habitue à une indépendance qu'il prend, de haute lutte, dès qu'il a grandi. A seize ans, à Paris, filles et garçons veulent vivre à leur guise. L'ouvrier, d'ailleurs, au lieu de se marier plus jeune que le bourgeois, ce qui était la règle jadis, ne se marie pas. Tous ces jeunes criminels dont le nombre aug mente sont des sans famille. De l'isolement, du célibat, de la démoralisation, les fem mes souffrent. C'est à elles de ne pas dé sespérer, de reprendre la lutte contre le cabaret, de se défendre. Mais ce serait à nous de les y aider en facilitant la vie de famille à bon marché pour l'ouvrier, alors que toutes nos conceptions fiscales et ad ministratives semblent aller vers un but opposé. Quant à la classe riche et à la moyenne bourgeoisie, je me demande avec anxiété si les femmes seront capables de com prendre et de jouer le rôle qu'on peut attendre d'elles. Il faudrait qu'elles eussent l'intelligence — qui paraît man quer aux hommes— de comprendre que si l'égoïsme reste l'âme et la loi des riches, ils se trouveront, d'ici à un'temps qu'on ne peut fixer, mais qui ne sera pas très lointain, en.face d'un cataclysme. Le suf frage universel a établi la loi du nombre : des questions politiques, l'application pas sera vite aux revendications sociales. Être souverain par le vote et crever de faim est un paradoxe. De plus, par le service militaire obligatoire, le nombre est ar mé. Une révolution trouverait d'autres soldats que les naïfs héros des légen daires barricades qui affrontaient l'armée avec des fusils de chasse. Si les femmes des hautes classes pensaient à quelque chose, et à cela en particulier, qui en vaut la peine pour leurs enfants au moins, elles agiraient sur les hommes dans le sens d'une prévoyance qui les pousse rait vers plus de justice. Mais, hélas! les femmes réformatrices sont rares .et presque toutes font fausse route. Elles poursuivent presque toutes la chimère d'une égalité qui ne fait que les isoler et qui satisfait fégoïsme de l'homme, en le débarrassant de toute idée de protection et d'aide. Et, pour la plupart, nos aristo crates et nos bourgeoises font comme les femmes d'ouvriers. Elles jettent le manche après la cognée. Le lien de famille se dé tend? Elles en profitent pour leur compte. L'homme est loin du foyer : la femme l'imite. Elle lui fait payer, par le luxe, la liberté qu'elle lui laisse. Chacun se « dé brouille » comme il peut. L'associée tend à devenir la femme entretenue légale. Et cette morale, cette conception de la vie qu'on qualifie gaiement de « fin de siècle » marche à la fin de tout. Car le temps ne finit jamais, mais les sociétés, quelque fois.., COLOMBA....

À propos

Fondé en 1884 par Aurélien Scholl et Valentin Simond, L’Écho de Paris était un grand quotidien catholique et conservateur. Il était sous la coupe financière du célèbre homme d'affaires Edmond Blanc, propriétaire notamment de plusieurs casinos et hôtels de luxe à Monte-Carlo.

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