Extrait du journal

Les capitalistes croient avoir tout dit quand ils répondent aux travailleurs : « Votre société de l’avenir sera une ca serne. » Nous prétendons absolument le con traire. C’est aujourd’hui qu’elle se cons titue, la grande caserne d’Etat, avec sa centralisation administrative et sa hiérar chie dans toute les branches. C’est cette énorme machine compres sive et oppressive que nous voulons dé truire de fond en comble pour qu’il n’en reste plus trace. De même que nous voulons l’individu libre, nous voulons la commune libre, autonome, groupée aux autres communes dans sa région et fédérée aux autres dans l’expression géographique qui constitue le pays. La commune doit fournir à tous scs enfants sans exception la nourriture, le logement, le chauffage, l'entretien, de leur naissance à leur mort, eu échange de leur travail. Cette conception est simple et natu relle. Chacun peut se l’assimiler aisément. L’enfant qui a ses parents reste dans la famille si celle-ci le désire, mais l’orphe lin sera élevé par la commune, non plus en paria comme aujourd’hui, mais en en fant gâté, puisqu’il e t malheureux d’avoir perdu ses soutiens îaturels. Le vieillard pourra à son choix finir son existence chez les siens ou recevoir de la commune la retraite due au bon citoyen qui a fait son devoir dans la vie. Y a-t-il là-dedans quoi que ce soit de monstrueux, d'anor mal ou d’autoritaire ? Les conditions d’existence du commu nisme différeront évidemment de nos conceptions actuelles. C’est l’association qui deviendra le pivot du système. Au lieu d’attendre quoi que ce soit du bondieu Etat, l’initiative individuelle ne devra compter que sur elle-même pour avancer sur la route du progrès. La commune sera à la fois industrielle et agricole. Toute l’énergie humaine sera dirigée sur la production intensive de la terre, afin que chaque citoyen ait sa large part de nourriture et qu’il n’y ait nonseulement plus, comme aujourd’hui, 90,000 morts de faim par an, mais que l’abondance règne partout et que des ré serves considérables puissent prévenir toutes les éventualités. Au moment de la moisson, de la vendange, de la récolte des fruits, toute la population valide don nera le coup de collier nécessaire pour que, les machines aidant, il ne se perde presque rien des produits dont à l’heure actuelle une faible partie seule est utilisée, pendant les bonnes années, faute de moyens suffisants pour les rentrer, les serrer ou les mettre en conserve. Le travail de la terre accompli, plutôt comme un plaisir que comme une tâche, les artisans, les ouvriers des villes, em portant la part de récolte nécessaire à leur consommation, retourneront chez eux avec leur femme et leurs enfants, qui auront bien su se rendre utiles pendant les multiples opérations de la moisson ou de la vendange, et, quittant leurs amis les paysans, jusqu’au printemps prochain, retourneront à leurs ateliers, à leurs fa briques, surveiller et diriger les machines fournissant les produits industriels. De cette libre association entre le tra vailleur de la ville et le travailleur des champs naîtra l’harmonie et le bonheur. Si, par extraordinaire, un individu égoïste prétend continuer soit à travail ler toute l’année à sa routinière fabrication de tel ou tel article ou bien à cultiver lui-même son lopin de terre sans assis tance, faudra-t-il lui faire violence ? Oh! que non pas. L’expérience lui viendra vite qu’il se trompe. Les vieux culti vateurs disaient autrefois que la venue des chemins de fer faisait pourrir leurs patates et ils allaient à pied par rancune. Leurs fils aujourd’hui prennent le train....