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L’Ère nouvelle, 9 juillet 1925

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L’Ère nouvelle
9 juillet 1925


Extrait du journal

LA BATAILLE DES IDÉES POUR LA PAIS La page qu’on va lire — et à laquelle plus de cent signatures de personnalités diverses donnent, par l’éclat et la variété de leur groupement, un sens et une portée considérables — devait paraître il y a quelques semaines déjà. Seule, l’élection du maréchal Hindenburg en a, par une réserve alors naturelle, retardé la publication. Aujourd’hui, où il est évident que rien n’est changé aux possibilités de rapprochement des deux grands peuples dont, mal gré tant de ruines et de deuils endurée, l’entente est condition de la paix mondiale, je considère comme un devoir de ne pas tenir plus longtemps secret ce document. Rédigé dans un sentiment de stricte et pure justice et faisant abstraction du fond même du procès (que j’ai, pour ma part, instruit dans mon livre “ LES CRIMINELS le manifeste que voici témoigne, par les noms qui l’ont fait leur, qu’il n'y est point question de soucis politiques, mais seulement d’un élan de libres esprits vers l'équité, d’un appel ardent à toutes les conscience* désireuses de voir »e dissiper, définitivement, les sanglantes nuées de la guerre. ‘ V Victor MARGUERITTE. Appel aux consciences Seul un malentendu sépare le monde de la paix. Ii perpétue entre les anciens belligérants, et particulièrement entre la France et l’Allemagne, cet esprit de guerre qui naît, fatalement du svniitr.rnt de l'injustice inséparable de l'instinct de revanche. L’opinion allemande ne subit qu’avec une révolte profonde des articles 227 à 230 (sanctions) et cet article 231 du Traité de Versailles, dont voici la teneur : « Les gouvernements alliés et associés déclarent, et l’Allemagne re connaît, que l’Allemagne et ses alliés sont responsables, pour les avoir causés, de toutes les pertes et de tous les dommages subis par les gouvernements alliés et associés et leurs nationaux, en conséquence de la guerre qui leur a été imposée par l’agression de L Allemagne et de scs alliés. » Ce n’est pas contre le fait matériel de* réparations que la nation allemande s’élève. Elle en reconnaît la né cessité. Elle s’incline devant un règlement dont les modalités internationales «ont enfin fixée*. Ce qu’elle n’accepte pas, c’est que lui ait été arraché par la force un aveu contre lequel, avant comme après sa signature, elle n’a cessé de protester H où elle croit voir proclamée, aux yeux du monde, sa culpabilité unilatéraie dans les origines et donc dans les responsabilités de la guerre. La France, d’autre part, s’en tient n ce dogme : l’agression matérialisée par l’invasion de la Belgique. Telle est la situation grosse de dangers qu'il faut à tout prix éclaircir. D’abord la question de fond. Impossible d’en préjuger ici. Cet immense procès, auquel l’Humanité tout entière est intéressée, ne saurait, dans le détail complexe de ses causes, *tre plaidé que toutes archives ouvertes, et devant une Haute Cour supra nationale. Ecartons-en donc, à priori, 1 idée. H reste — (les documents officiels en témoignent) — que l'article 231 ne fut extorqué à l’Allemagne que par violence, et sous menace de recommencer aussitôt la guerre. jusqu’à ruine complète. Ce procédé indigne de la civilisation, pouvons-nous, — après av-^r déclaré soutenir la guerre du Droit contre la Force. — lui donner force de Droit ? Le temps des justices sommaires et sans appel est passé. 11 est aussi inique de condamner un peu ple au déshonneur qu’un individu à la mort, sans un débat contradictoire. Nous, Français, soucieux de l’honneur de notre pays et croyant aussi, fermement, que toute violation de Jus tice porte en elle les catastrophes futures, nous entendons ne pas encourir le reproche d’une atteinte aux princi pes mêmes dont nous nous réclamons. S’il ne peut être, cependant, question de la refonte matérielle du traité, dont seul le temps et la Société des Nations se peuvent charger, s'il ne s’agit pas davantage du reglement des réparations, fixé par la Convention de Londres (Août 1924). il dépend du moins de notre bonne volonté à tous que fia Charte imposée à Versailles ne pèse plus, par contrainte, sur l’instable équilibre où nous vivons. Nulle sécurité dans l’avenir, si l’on ne procède d’abord au désarmement moral sans lequel il n’y aura, jamais de désarmement matériel possible. L’article 231 doit être modifié dans un sens acceptable pour tous, de même que doivent être abrogés (au titre : sanctions) les articles 227 à 230 qui, entretenant la haine avec ses représail les, ne sont pas moins nuisibles au rétablissement définitif de la Paix. Nous sommes à un carrefour. Il faut choisir. D’un côté tous les maux de fia guerre, perpétués par l’esprit de revanche. De l'autre, la réconciliation sincère et le labeur fécond. Nous invitons tous ceux dont le foyer reste en deuil, tous ceux qui gardent au cœur l’amour de la justice et de la vérité, tous ceux dont la raison de vivre est pour leurs fils un avenir libéré de la guerre, à joindre leur ins tance à la nôtre. Que le Nationalisme allemand ne s’y méprenne pas. Ici, nulle preuve de faiblesse. Seulement un témoignage de la droiture française, un pas vers la «solidarité humaine. L’Allemagne de Gœthe le comprendra. La civilisation européenne joue en ces jours tragiques son va-tout. Elle est perdue ai la boucherie recom...

À propos

L’Ère nouvelle a été fondée en décembre 1919 par deux socialistes déterminés, blessés de guerre : Yvon Delbos (1885-1956) et Gaston Vidal (1888-1949). Elle se définit en se sous-titrant « L’Organe de l’entente des gauches », et restera tout au long de son existence proche du parti radical. Malgré son faible tirage, le journal exerçait une influence importante dans le monde parlementaire.

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