Extrait du journal

r 'Aimez-vous les rétrospectives? On en organise à tout bout de üehamp A tout propos. Les Arts, le Théâtre, la Société, les mœurs, la vie, le costume, le mobilier, etc..., Tout est motif à ces résurrections d epoque, a ces regards en arrière. t , Le mot de Balzac,à Mme Hanska S’impose à la mémoire : « Chaque pas que je fais dans la vie me donne une profonde estime pour le^passé. » Mais les amateurs de rétrospectives sont-ils sincères, et n’est-ce pas pour, .eux tout simplement une distraction pour passer le temps? Ils sont telle ment, en général et d’autre part, épris de progrès et d’innovations, qu’un certain snobisme doit n’être pas tout à fait étranger à leur goût sou dain pour les vieilles choses et les décors surannés. , Quoi qu’il en soit, profitons de ces (expositions qui se suivent sans tou jours se ressembler pour laisser de côté momentanément les albums et les livres illustrés où nous cherchons d’habitude, quand il nous prend envie d’en baigner nos yeux, les souvenirs ^d’autrefois. .4 L-4 Les classes laborieuses, la petite bourgeoisie et le peuple n’offrent à la vue aucune toilette qui soit digne d’un signalement. On n’en trouve les vestiges que dans les tableaux de sJ genre et les dessins et croquis des petits maîtres du temps. C’est grâce à eux que nous savons comment s'habil lait, par exemple, l'homme de la rue, l’ouvrier, enfin la multitude. Si cela vous est indifférent, ne m’en dégoûtez pas. En visitant dernièrement, deux ou trois rétrospectives dont on a parlé, 'je songeais à l’intéressante Exposition du costume ouvrier depuis cent ans, que l’on pourrait faire, avec des élé-, ■ ments épars, mais qui existent ; dans les cartons. Je n’ai pas encore vu la traduction au cinéma du célèbre roman d’Emile Zola L'Assommoir. Mais je. me .suis ' laissé dire, sans cacher ma pénible surprise, que les personnages de l'œu vre dont la publication remonte à 1877; sont habillés comme de nos jours! Or il y a lieu d’observer que ces personnages appartenaient déjà au Second Empire, à telle enseigne que le romancier, pour les dessiner, s’était inspiré du livre : Le Sublime tou le travailleur tel qu'il est .en 1870, de Denis Peulot, ancien ouvrier et maire du XI* arrondissement. Alors, habiller et raser complète ment, comme ils le sont aujourd'hui, les ouvriers contemporains de Coupeau, de Mes Bottes, de Bec-Salé et du sergent de ville Poisson, n’est-ce pas, en vérité, commettre un anachro nisme un peu fort ? D’autant plus que l’assommoir s’est non moins trans formé que sa clientèle. On nous dit, et je le crois, que la physionomie de l’ouvrier parisien a fort peu changé depuis cinquante ans et que la Mode n’a pas pour lui la même importance que dans les autres classes sociales. Quelle blague ! Où voit-on encore, parmi les ouvriers, les blouses blanches, les vraies, qu’ils portaient sous Napoléon III ? Pas même sur les chantiers. L’ouvrier, sa journée, faite, s’habille comme tout le monde. C’est pourquoi, à défaut de la * rétrospective » que pouvait être, pour le costume, L'Assommoir au cinéma, j’aimerais à ce que l’on en (organisât une pour nous montrer que le type, en un siècle, s’est modifié. Coupeau, Gueule d’Or et Poisson n’ont pas seulement fait, tomber, l’un , (son bouc, l’autre son collier de barbe et le troisième sa moustache aux poin tes, cirées et son impériale à la Badin. guet... S'ils ne créent pas la mode et...