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La Dépêche du Berry, 5 février 1939

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La Dépêche du Berry
5 février 1939


Extrait du journal

Hitler a copieusement parlé, trop copieusement parlé peut-être, car on ne saurait discerner le moins mauvais du pire dans sa longue et filan dreuse diatribe. Qu'a-t-il voulu dire au juste quand il a déclaré qu’ < une guerre contre l'Italie d'aujourd'hui, quels qu’en soient les motifs, appellera l’Allemagne à ses côtés > ? Quelle guerre ? Une guerre déclarée « à » l’Italie ou déclarée « par > l’Italie ? On aimerait à être fixé. Après cela, que valent ses affirmations de croyance en une < longue paix » ou de désintéressement « au point de vue territorial en ce qui concerne la France et l’Angleterre, en dehors de la restitution des colonies, dont on ne saurait cependant y voir un de ces problèmes de nature à conduire à un conflit armé »? Si les revendications coloniales du nouveau Reich ne peuvent pousser à la guerre, on se demande pour quoi et comment une guerre avec l’Italie peut s’envisager. A cause de ses propres revendications territoriales ? Le Führcr n’y a fait aucune allusion, mais il tombe sous le sens que, s’étant servi le premier, en Autriche et en Tchécoslovaquie, il ne soit de mèche avec le brillant second, pour l’aider dans ses entreprises méditerranéennes. M. Neville Chamberlain, qui a parlé mardi aux Communes, continue à croire, dur comme fer, à la bonne foi de ses protagonistes. Il fait confiance < aux assurances répétées de M. Mussolini » et retire de la harangue enflammée du Reichsführcr < l'impression la plus nette que ce n'est pas pas là le discours d’un homme qui se prépare à lancer l’Europe dans une nouvelle crise. » Nous voudrions bien avoir la même certitude, mais il nous faudrait pour cela le parapluie de M. Cham berlain ! Nous ne sommes pas seuls, du reste, à douter de la bonne foi des deux dictateurs. Une voix vient de s’élever d’outre-Atlantique, qui laisse clairement entendre que nos amis de la grande République amé ricaine ont les mêmes appréhensions. Le Président Roosevelt aurait déclaré, au cours d'une séance de la Commission de l’Armée du Sénat, qu* « en cas de guerre les frontières des Etats-Unis seraient en France. » L’exposé du Président, d’après les dépêches de presse, aurait été « vraiment alarmant ». 11 aurait précisé que « les Etats-Unis doivent se préparer à aider les démocraties dans le cas d’une attaque de la part de la combinaison Rome-Berlin-Tokio, en fournissant aux démocraties les armes nécessaires. » C'est une excellente réponse à la logomachie du Führcr et du Duce. Et sur quoi se base donc le Président Roosevelt pour étayer ses sensationnelles déclarations ? Sur « les renseignements recueillis depuis longtemps sur les projets des Etats totalitaires et sur leurs armements, sur le discours du chancelier Hitler qui, bien que modéré de ton, n’en révèle pas moins l’intention du Reich «'intensifier la li,ttc entre les idéologies totalitaires et démocratiques dans le monde entier ; enfin, sur sa conviction que l'opinion publique américaine est d’accord avec sa politique de soutien positif des démocraties. » Rien de plus, rien de moins. Que la presse allemande accueille avec rage ces paroles du Président Roosevelt, voilà qui est compréhensible. Il en sera tout autrement en Grande-Bretagne et en France, où elles auront un écho formidable. On finira bien tout de même par comprendre, môme en Angleterre, qu'il y a intérêt à parler net avant que l’irréparable ne soit accompli, comme en 1914 î La France et l’Angleterre ne sont plus seules dans le monde, en dépit du fameux axe. Combien serait-il à souhaiter, pour le maintien de la paix mondiale, qu’à l’Est un grand pays revienne enfin à des méthodes un peu plus ordonnées et à une plus saine compréhension du grand rôle qu’il aurait à jouer dans le concert européen et asiatique, pour contrebalancer les forces mauvaises qui poussent à un nouveau conflit. Mais la vie n'est faite que d'espérance ; il ne nous est pas interdit de croire, puisque aussi bien M. Chamberlain le dit, que .< l'apaisement général de l'Europe est encore possible. P.-S. — M. Roosevelt vient de publier une mise au point, au sujet des déclarations qu'on lui avait prêtées. Mais, si ses paroles avaient été grossies, la sympathie du Président des Etats-Unis pour les démocraties n’en demeure pas moins certaine....

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Fondée en 1893, La Dépêche du Berry était un journal régional suivant une ligne éditoriale de centre-gauche, ou « radicale ». Il paraît jusqu'en 1944.

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