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La France, 18 mars 1913

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La France
18 mars 1913


Extrait du journal

rempart, montra du geste à l’ennemi « que le moule était encore là » ! Quand vous aurez compris le sublime de ce geste indécent, la France sera sauvée, madame, cl nous n’aurons plus besoin du service de trois ans. Je sais bien que vous avez tout de même un bon petit cœur. Vous iriez vo lontiers soigner les blessés sur les champs de bataille, comme l’ont fait des femmes infiniment respectables qui ont donné un grand exemple. On m’as sure même que vous fréquentez les hô pitaux et que vos mains adroites excel lent à faire un pansement. Je ne veux pas savoir si ce genre de dévouement vous séduit par son côté théâtral. L’œu vre, quel qu’en soit le motif, est méri toire. Je reconnais même, avec l’ingé nieux écrivain qui signe Fœmina dans le Figaro, que vous y mettez un sérieux, un soin minutieux tout à fait dignes d’éloges. Mais permctlcz-moi de vous dire que le devoir de « surérogation », pour employer le langage du catéchis me de persévérance, ne vous dispense pas du devoir essentiel de votre sexe. Ce serait en quelque sorte sacrifier le pain de ménage à la brioche et négliger le pot au feu pour la confiture. Et puis, voyez-vous, ce n’est pas de remèdes lénitifs que nous avons besoin. Il y a trop de pharmacies dans nos villes. Les œuvres d’assistance, dont je me garderai bien de médire, envahis sent tout. La France est en train de de venir un grand hôpital. Un s’occupe des malades, des vieillards, des retrai tés : c’est Liés bien. Mais j’aimerais mieux un plus grand nombre de pou ponnières, et surtout des logements plus vastes pour multiplier les poupons dans la famille. Nous nous attendris sons volontiers sur le passé : un grand : peuple doit avoir les yeux dirigés vers l’avenir. — Mais enfin, répondrez-vous, pour > faire des enfants, il faut être deux. C’est mon mari qui ne veut pas !... Là-dessus encore, j’ai des doutes, chère madame. Si vous employez la moitié de vos grâ ces à mettre cet homme qui vous aime dans le chemin du devoir et à l’y retenir jusqu’au bout, la résistance masculine sera bientôt vaincue. Mais du haut en bas de l ’échelle sociale, neuf fois sur dix, c’est la femme qui parle budget, qui recommande la prudence et qui arrête l’élan créateur. On fait en ce moment une très belle campagne pour améliorer la condition des femmes et on a bien raison. Proté ger celles qui ne peuvent trouver de mari, mettre les autres en état de con tribuer aux dépenses communes, c’est parfait. Mais les dispenser d’avoir des enfants et les soustraire à la fonction essentielle de leur sexe, ce serait tout bonnement criminel. Dans un pays comme l’Angleterre, où le nombre des femmes dépasse notablement celui des hommes et où les citoyens sont si nom breux que le sol natal ne suffit point à les nourrir, les suffragettes peuvent s’agiter tout à leur aise et casser les devantures de magasins sans grand dommage pour la nation. Chez nous, , c’est une autre affaire. Il paraît que certaines sibylles, encouragées par cet exemple d’outre-Manche, prêchent ou vertement la stérilité dans les réunions populaires. Je ne suis pas méchant, mais si jetais roi « pour cent ou sixyingts ans », comme dit l’autre, je les ferais fouetter en place publique. Quelques personnes voudraient en voyer les femmes à la caserne pour faire la cuisine et raccommoder le linge. Manifestation de parade, illusion dangereuse ! on sait trop ce que de viennent ces anges de dévouement, et les armées qui les traînent dans leur bagage ont toujours été vaincues. Et puis tout cela, ce sont de vains palliatifs. Non, mesdames, vous avez une tâche plus digne et plus belle, c’est * de remplir la caserne. Soyez d’admirables sœurs de charité, 110us applaudirons. Menez, comme les Suédoises et les Norvégiennes, une vi goureuse campagne contre l alcoolisme, ce sera mieux encore. Mais si, françaises patriotes, vous voulez sé rieusement guérir le mal profond qui ronge notre pays, formez, formez la li gne des mères de famille pour l'accrois sement de la natalité ! Vous aurez alors le droit de vous pâmer, au cours de M. Bergson sur l’évolution créatrice. RENE MILLET....

À propos

Lancée en 1862, La France était un quotidien suivant une ligne éditoriale à la fois libérale et favorable au Second Empire. Durant la Commune de Paris, le quotidien publia également une édition départementale imprimée à Tours. En 1874, Émile de Girardin, fondateur de La Presse et grand entrepreneur médiatique également proche d’Adolphe Thiers et de Gambetta, rachète le journal. Sur quatre pages, on y écrit de longs articles, en plusieurs parties, qui s’étendent parfois même sur plusieurs jours.

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