Extrait du journal

mais, la cinquième, on l’enferma dans une forteresse. C’est là qu’il avait fait connaissance avec la patate, le menu ordinaire des prisonniers, ses frères. Les autres trouvaient cette nourriture détestable. Lui, s’en délectait, et il pen sait aux pauvres, dont ce gérait la vie. De retour en France, il cultiverait cette pomme de terre qu’on jugeait à peine digne de l’auge. Il avait déjà enseigné beaucoup de choses utiles à ses compatriotes. Par des ! leçons, par des mémoires, par des livres, il leur avait appris l’art de préparer les remèdes ; il leur avait appris les moyens de conserver les grains, les raisins, les boissons, les viandes ; il leur avait en seigné les procédés pour fabriquer le vin, la bière et l’eau-de-vie, les moyens de tirer parti des châtaignes, de l’orge et du mais, l’art de bien moudre le grain, de boulanger et de bien cuire le pain. 11 leur avait môme donné une recette pour « faire de la bonne soupe ». N’est-ce pas lui aussi qui a découvert la manière de faire les gâteaux de Sa voie? Pour la pomme de terre, il agit de môme ; il ne se borna pas à cultiver, il écrivit. « A quoi est-elle bonne, la pomme de terre? A tout... Il y a dans ces tubercules une fine et blanche farine qu’on peut en extraire facilement. Avec cette farine, on peut faire du pain, du bon pain. Et non seulement du pain, mais bien autre chose encore : de fines bouillies, d’excellents gâteaux. Tenez, goûtez : ceci est du sucre que j’ai fabriqué avec mes pommes de terre. Avec la pomme de terre je peux vous faire de l’cau-de-.ie sans raisin, comme je fais du pai:> sans blé; je peux en extraire de \ esprit de vin. Aimez-vous mieux du vinaigre? Voici du vinaigre de pommes de terre... » On continuait à ne pas croire. On di sait : « Il est fou! » Le préjugé. * ** H s'en alla trouver le roi Louis XVI, qui lui donna un vaste champ à Grenelle, un terrain aride, tout sable et gravier, la Plaine des Sablons. « C’est justement ce qu’il me faut, se dit Parmentier ; je leur prouverai que la pomme de terre peut venir sur un mauvais terrain. » El le printemps d’après, en effet, une verdure drue sortait du sol et s’étendait à perte do vue. Les bourgeois, le dimanche, venaient se promener autour du champ, pour voir. Seraient-ils convaincus cette fois ? Parmentier ne le crut pas, et le jour de la fûte du roi, le 21 août 1781, — il fallait frapper un g and coup,— il sc pré...