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La Presse, 27 septembre 1891

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La Presse
27 septembre 1891


Extrait du journal

trop souvent victorieux que la fatalité nous a imposé la défaite. Que l'Allemagne soit vain cue demain, et je la défie de pouvoir en dire autant, à moins qu'elle?n'ait, sous son casque à paratonnerre, autant de toupet que vous, Sire l Guillaume ne s'est d'ailleurs pas contenté de nous corner aux oreilles la gloire de ses ar mes : il nous a modestement annoncé que les œuvres de Wagner ne tarderont pas à ger maniser l'Europe. Et voilà le bouquet, mes dames! La perspective n'est pas d'une gaieté folle. Je me représente l'Europe germanisée. Aligne ment ! fixe ! Partout la même bière et la même choucroute. Plus d'esprit. Ce serait à se faire naturaliser dahoméen dans les vingt-quatre heures. Le hasard, et peut-être aussi la bonté des dieux, ont voulu que Wagner soit venu un peu sur le tard, dans un monde trop vieux ; car il n'y a pas à dire, il lui serait bien diffi cile de germaniser l'Europe, à présent que nos génies l'ont si bien francisée. C'est beau, la musique, surtout quand on ne regarde pas à la dépense du cuivre ; mais ce n'est pas mal du tout aussi, ce gentil esprit français qui dit toujours quelque chose et qui le dit si bien ! C'est avec ça, tout simplement, que nous avons pris l'Europe et que nous l'avons gardée. Guillaume l'ignore peut-être ; maïs il n'a, pour se renseigner, qu'à fouiller dans les archives de sa propre cour : il y trouvera de l'esprit d'un nommé Voltaire qui fut un autre conquérant d'âmes que le Prus sien Wagner. Si pourtant cette découverte ne lui suffit pas, je lui conseillerai d'envoyer, en langue allemande, une note -diplomatique, soit à l'Autriche, soit à l'Italie, qui sont ses deux fidèles alliées. La protestation ne traînera pas : elles lui renverront sa note par le refour du courrier, sous le prétexte que le français est la seule langue de la diplomatie. Et voilà une note qui fera plus de bruit que toutes celles de la musique allemande ! Allons, Majesté, à quand la petite expé rience? Si elle vous réussit, cela vous vaudra bien mieux que d'écrire une nouvelle lettre à la veuve, et vous n'aurez plus, en signe de joie, qu'à faire doubler les trompettes de votre orchestre wagnérien. Nous attendons. Que les sourds se le disent ! CLOVIS HUGUES....

À propos

La Presse, fondé en 1836 par Émile de Girardin, fut l’un des premiers grands quotidiens populaires français.

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