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La Quotidienne, 11 octobre 1835

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La Quotidienne
11 octobre 1835


Extrait du journal

FRAX^E. PARIS, 10 OCTOBRE. DES DERNIERS ACTES DU GOUVERNEMENT DE MADRID. Les nouvelles arrivées hier au soir de Madrid sont décisives ; elles donnent le caractère d’un fait accompli à ce qui n’était en core qu’induction politique et prévision. La reine Christine se jette dans les liras des révolutionnaires ; la révision du statut royal par les cortès est décidée, la souveraineté du peuple estjpar là implicitement reconnue, les prérogatives de la couronne, la loi d’élection; toute la constitution, en un mot, est soumise au contrôle des cortès actuelles qui vont se trouver transformées le 16 novembre en assemblée constituante. M. Mendizabal est à la fois le Neeker et le Rolland de la révolution espagnole. Et, disons-to à ce sujet, qu’on ne s’étonne point de voir la presse tourner sans cesse ses regards vers la Péninsule. La presse ne fait que suivre en cela le mouvement des esprits. Or, si tous les esprits se portent en ce moment vers les événemens du dehors, c’est qu’ils ont l’instinct de la situation. Au dedans, les doctrinaires ne pouvant vaincre les conséquen ces de la révolution de juillet, les ont du moins couvertes d’un voile. Ils ont obtenu de la dernière législature le bénéfice du huisclos. On sent bien le travail intérieur de l’esprit révolutionnaire; il s’échappe de temps à autres du cratère quelques chaudes bouf fées qui vous avertissent que le Vésuve n’a pas dit son dernier mot. Mais les doctrinaires, en gens de ressources qu’ils sont, ne pouvant détruire le volcan, ont ordonné à la France d'oublier qu’il existât. Ils en ont tant bien que mal dissimulé l’ouverture, et sur l’édifice qu’ils ont échafaudé au-dessus, ils jouent leur co médie de puissance politique et d’ordre social. Au fond, la situa tion n’est pas changée, et l’état des choses est le même ; mais qu’importe ? Le Journal des Débats, tour à tour catholique et es prit fort, peut protéger, de deux jours l’un, le clergé et l’Evan gile, et donner l’autre à la défense de l’athéisme et de Diderot. Dans la situation du dehors, au contraire, il n’y a point de voile, point de dissimulation possible. Les événemens et les hommes s’avancent à la lumière du soleil. On peut compter pas à pas tous les progrès de la démocratie ; là, elle ne travaille point sous terre, elle marche à la surface du sol. Toutes les fois donc qu’on veut s’éclairer sur la grande question de l’époq ue, sur celle qui comprend toutes les autres questions politiques, toutes les fois qu’on veut savoir où en est la révolution, c’est désormais au-delà des frontières qu’il faut porter ses regard s, car là les symptômes sont apparens. Les doctrinaires ont le bras court, et leur manteau de sophistes dont ils voudraient couvrir la situation extérieure comme la situation intérieure, ne s’é tend pas plus loin que leur puissance. Et ne dites point que les symptômes dont nous parlons ne prouvent que pour les localités où ils se manifestent Dans les temps où nous sommes, il n’y a plus de localités, plus de ques tions particulières ; il y a, d’un côté, la cause monarchique, de l’autre, la cause révolutionnaire ; la révolution européenne et la royauté européenne. Quand il y a donc un pas de fait en avant par une démocratie, toutes les démocraties se trouvent avoir fait ce pas. C’est en Espagne, en Angleterre, si vous le voulez, que le fait a eu lieu, mais c’est la révolution européenne qui a marché. Cela vous explique le profond sentiment de crainte dont les doctrinaires sont saisis à la vue des rapides progrès du radicalis me anglais représenté par O’Coanell, l’espèce de fureur avec la • quelle ils se sont prononcés contre les juntes révolutionnaires de l’Espagne, et les paroles de colère qu’ils ont jetées au gouverne ment de Madrid. Mais cela vous fait aussi toucher du doigt toute l’impuissance de leur système et toute la vanité de leurs espé rances, obligés qu’ils sont d’assister aux progrès de la révolution générale, eux qui ont entrepris de la fixer dans de certaines limi tes par un intérêt d’égoïsme et d’ambition. Voilà pourquoi tous les esprits se tournent vers les questions extérieures, et notamment vers la question espagnole, qui préoc cupe au même point et le ministère et ses adversaires politiques, et la presse du pouvoir et celle de l’opposition ; voilà pourquoi...

À propos

Publié d’abord sous le nom La Quotidienne en 1792, ce journal royaliste est l’organe principal de Joseph-François Michaud. Historien des croisades, ce dernier est d'abord républicain, puis devient royaliste par hostilité à la Convention. Ces revirements firent changer le journal de nom plusieurs fois durant la Révolution, l’Empire et la Restauration avant de retrouver, en 1814, son titre initial. En 1815, le journal devient la Feuille du jour.

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