Extrait du journal

— Oui, messieurs, c’est un art tout comme un autre, et je pourrais vous l’apprendre en vingt-deux leçons. J’aurais pu me faire professeur de vol, mais je n’ai pas besoin de cela pour vivre. J’ai six mille livres de rentes et je m’appelle Paul Michoz. Dès ma plus tendre enfance, le vol a été ma constante préoccupation. La huit je rêvais que je volais. Le ji)ù> je m'occupais des moyens de voler. Je puis dire que je n’ai pas vécu une heure sans m’occuper de la réalisation de ce grand problème qui agite tous les inventeurs, le vol. Enfant, je disséquais des mouches et des hannetons pour surprendre le secret de leur appareil de loco motion aérienne. Jeune homme je me ruinais en achat de pinçons, de bouvreuils, de fauvettes, de moineaux francs, et, j’étudiais le mécanisme de leurs ailes. Homme fait, j’ai trouvé le moyen de fabriquer des ailes. En quoi? me direz-vous. En toile, en plumes, en taffetas eu cire? Non, messieurs, en caoutchouc, en simple caoutchouc, La toile se mouille, les plumes s’enlèvent, le taffetas, se déchire, la cire fond. Le caoutchouc seul réunit toutes les qualités nécessaires pour le vol. J’ai découvert récemment que les ailes de la chauve-sou ris sont en caoutchouc. L’aile étant trouvée, il a fallu enseigner au public la manière de s’en servir. C’est pour cela que j’ai composé l’art de voler. Poème épique en trois chants. Le premier chant est intitulé le Premier vol, et il commence par une invocation à la muse. Deuxième chant. — Les enfers envoient le démon de la routine pour s’opposer aux progrès de ma dé couverte. Le poème se termine par un cantique chanté par six mille personnes qui planent an dessus de Paris avec des ailes en caoutchouc de mon invention. Le tout broché pour le prix de trois francs cin quante centimes ; relié six francs. Vous êtes fort capables de me dire : — Mais, mon cher monsieur Michoz, depuis Icare...