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Le Figaro, 18 mai 1936

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Le Figaro
18 mai 1936


Extrait du journal

Mlle Blanche Montel, qui est une charmante comédienne, joue en ce moment à Nice- une pièce de M. Paul Géraldg ; et Nice lui a rappelé l'épo que de ses débuts. L'artiste a accueilli sans amertume comme sans apitoie ment les appels de ce temps-là, qui ne doit pas plonger, d'ailleurs, dans un passé bien lointain. Et elle l'a évoqué devant un journaliste niçois avec beaucoup de bonne ' grâce : « Oui, j'ai fait mes débuts à Nice. Je gagnais alors mille francs par mois et j'habitais, rue Alphonse-Karr, un petit hôtel où je payais seize francs par jour. Vous pouvez le ra conter. Je ne rougis pas de l'époque où. je portais des bas de coton. » C'est très gentil. Apprécions les âmes claires qui savent ne rien ou blier des hasards de la vie. J'ai en tendu pareillement Mlle Jane Renouardt évoquer line jeunesse où elle rentrait de l'école en grimpant sur le ressort des fiacres comme une -petite fille de Poulbot : « J'avais déjà le goût d'avoir ma voiture... disait-elle spirituellement. Le jour où la société ne:permettra plus ces che minements du talent, de la fortune, ces ascensions romanesques, je ne sais s'il y aura davantage de justice dans le monde, mais il y aura cer tainement' moins d'attrait à y vivre. Bref, Mlle Blanche Montel s'est rap pelé avec bonne humeur les mois du locati à seize francs par jour, et elle a voulu revoir son hôtel. Mais on l'a démoli... N'importe, nous la croyons volontiers sur parole et même qu'elle s'y soit trouvée très bien. Ce qui me semble plus improbable, ce sont les bas de coton. Vraiment, mademoisel le, vous portiez des bas de coton? Ne les avez-vous pas introduits dans vos souvenirs comme un symbole, le symbole des années difficiles ? Des bas de coton ? Je croyais que depuis la guerre — et votre jeunesse date de ce temps-là — les bas de coton n'étaient plus qu'une survivance, que nulle femme, jeune ou mûre, nen portait plus et que les premiers six jrancs qu'on gagnait c'était pour acheter des bas de soie — artificielle, certes, mais point de coton. Un auteur d'un talent poétique et fort qui fut avec Hofmannsthal le meilleur écrivain de l'Autriche au commencement du siècle, a montré dans quelques-uns de ses ouvrages de tendres jeunes femmes, gracieuses, indépendantes, un peu bohèmes, des Mimis moins romantiques, et joli ment viennoises. Comme on 'lui de mandait, après la guerre et les ter ribles années qui l'ont suivie en Au triche, ce qu'elles étaient devenues, cet écrivain, Arthur Schnitzler, ré pondit, morose : ■ Elles sont mortes... ou elles ont des bas de soie. Elles avaient en effet des bas de soie. Je crois même que les bas de soie auront été la véritable conquête de la guerre, la seule victoire dura ble, celle que personne ne discute plus. Il en faut bien une. Guermantes....

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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