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Le Figaro, 28 juin 1932

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Le Figaro
28 juin 1932


Extrait du journal

Des moeurs nouvelles se sont introduites au Pa lais chez les avocats : la candidature officielle au conseil de l'ordre. Chaque année, en effets on élit ou réélit les vingtquatre membres du conseil. Les anciens bâtonniers, soumis à la réélection, sont tous traditionnellement réélus, de même les membres du conseil qui n'ont pas terminé la durée de leurs fonctions. Mais potjp les places-vacantes, ^ui* élit-en -? <«'ies* plus dignes », disaient les vieux règlements. Mais1 comment connaître lés plus dignes où tout au moins ceux qui désireraient faire partie du conseil ? Il y avait glors des candidatures ; officieuses. Ceux qui postulaient cette fonction donnaient des dîners, des thés, des soirées de bridge ou des cocktails parties. Cela coûtait assez cher pour, bien souvent, un maigre résultat. Puis ils lâchaient dans le Palais, comme une meute, leurs amis, leurs secrétaires des deux sexes, qui allaient souriants et aimables — de plus en plus aimables à mesure qu'approchait le mois de juin — serrant des mains, quémandant, récoltant des voix pour leur ami, pour leur patron. Vers 1858, Edmond Rousse, le futur bâtonnier de 1870, était déjà écœuré de ces procédés. On a changé tout cela. Il y a désormais des can didatures officielles. Oh ! on n'a pas osé, dans l'ar rêté du conseil de l'ordre du 15 décembre 1931, prononcer le mot candidature. Il est contraire à la tradition. Il faut continuer à voter pour « les plus dignes ». Mais ceux qui se considèrent comme les plus dignes vont maintenant s'inscrire sur un registre déposé au secrétariat de l'ordre. Ce ne sont pas à proprement parler des candi dats. On n'a pas donné cette entorse à la tradition. Ce sont simplement les « avocats qui ont exprimé le désir que leurs voix soient comptées ». Oh ! qu'en termes galants ces choses-là sont dites 1 Mais qu'on ne s'y trompe pas. Il y a bel et bien aujourd'hui de la candidature officielle au Palais* Mais qui n'est pas, partout, un peu candidat à quel que chose ? La candidature est la plaie de l'époque actuelle. La candidature et la recommandation. Vaut-il mieux l'avouer ou le cacher ? ■ Bref, hier, au/vestiaire des avocats, on pouvait voir une grande affiche blanche portant en grosses lettres imprimées : « Elections au conseil de l'ordre du 30 juin 1932 ». C'est le nouveau jeu et la première fois depuis qu'existe l'ordre des avocats que l'on voit ce pan neau électoral. Ensuite, on lisait : « Membres pouvant être réélus ». D'un côté les anciens bâtonniers, de l'au tre les membres du conseil qui, tous, doivent être réélus. Puis, écrit à la main, les noms des « avocats ayant exprimé le désir que leurs voix soient comp tées ». ' ' ' ' Il y a cette année-ci deux places vacantes au conseil de l'ordre ; une réservée au membre qui, élu cette année, succédera plus que probablement l'an prochain à M. le bâtonnier Léouzon le Duc. Donc, en réalité, il n'y a qu'une place pour Un nouveau membre, pour un jeûné (un de ces jeunes qui ont parfois soixante, ans passés —j! et plus). Savez-vous combien se sont fait inscrire' comme candidats ? Combien, pour une seule place se croient les « plus dignes » de l'occuper ? Oh ! ils sont bien.;plus nombreux que pour un fauteuil à l'Académie ! Ils sont simplement soixante-huit 1 Mœurs ^nouvelles. 11 faut éspérer qiib dans les '« mœurs nouvelles » on ira jusqu'au bout, et que l'an prochain on1 aura des affiches sur jolis panneaux de bois, des affiches avec programmes, professions de foi, etc. Et même réunions publiques, le soir, dans la salle dés criées. Quand on fait de la candidature, on n'en saurait trop faire. Les soixante-huit noms sont rangés, non pas par lettres alphabétiques, mais par ordre d'inscription au tableau des avocats, c'est-à-dire à peu près par rang d'âge. Système évidemment curieux, puisque l'élection ne se fait pas à l'încienneté. Et ce procédé nouveau n'empêche pas, comme par le passé, la candidature par conciliabules mys térieux dans les petits coins et recoins du Palais. Invalidera-t-on jamais ? C'est une question qu'on pourra un jour poser. Georges; Claretie....

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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