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Le Gaulois, 20 juillet 1883

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Le Gaulois
20 juillet 1883


Extrait du journal

Sourire à cette mémoire, désormais éveillée, des bons jours d'autrefois, des bonnes heures de naguère, dont le panorama sans cesse déroulé est, j'imagine, une des premières et plus sereines joies de la mort. Tous ceux qui s'en vont ne veulent pas être pleurés de même. Les uns commandent de grands deuils éternels le lierre et l'immortelle sont plantés sur leurs tombes. D'autres attendent, comme une récompense, de moins sombres hommages, de moins désolantes tendresses Us nous montrent le tertre vert sous lequel ils reposent, et disent < Sein'ez là d'abord le charme discret des violettes et des pensées, puis la foison des Muets, puis la jeunesse des primevères, puis l'éclat des rosés t. Ainsi parlerait notre amie Gabrielle, et elle ajouterait'même < Semez ai~ssi le sang des coquelicots ` Je ne fais point, de la sorte, allusion à sa. politique de femme, un peu vivement colorée. Mais je me reporte à l'époque, déjà loin, il y_a vingt ans, où, des hauteurs de Montmartre, elle descendait dans Paris, avec des touffes de fteurs des champs plein les bras des balais d'herbes folles, égayés de coquelicots ces libres papUilbns des blés que les grisettes d'alors poursuivaient, en chantant, dans la maigre campagne suburbaine, où les avait jetés quelque vent de hasard, peutêtre bien le souffle de Paul de Eock. Grisette, elle surtout, j'ai beau l'avoir connue < dans le velours et dans la soie c'est en petit bonnet et en jupe de jaconas qu'elle me revient à présent, trottant menu, pimpante et leste, aux confins de Batignolles, arrosant des pots do capucines à sa fenêtre, où pend une cage de pinsons et de chardonnerets, et ne s'arrêtant de chanter que pour se bourrer de galette. Un jour que Mimi dégringolait ainsi, pauvre et jolie comme l'Amour, de son côté montait Rodolphe, pauvre à coup sûr, mais pas joli du tout. Quelque chose sous le bras, quelque manuscrit, quelqu'une de ces œuvres de début, qu'on ne quitte jamais. qu'on porte avec une inconsciente fierté, si légèrement qu'on se demande comment tout l'avenir y tient il allait, le nez en l'air, songeant à la gloire des bonnes fortunes, et, moins loin, à la fortune des bons biftecks. Comment et où cela se ût-il? Ces deux jeunesses s'accrochèrent au passage, voila. le certain. Elles mirent tout de suite en commun leur appétit et leurs espérances. Et l'on commença la libre vie, au soleil des dix-huit ans de Mimi. Un peu de travail et beaucoup de tendresse; puis beaucoup de travail et toujours assez d'amour en&n le bien-être, la notoriété, l'amitié vingt années de deux existences ont couru dans ce cercle de bonheur étroit....

À propos

Lancé par Edmond Tarbé des Sablons et Henri de Pène en 1868, le journal de droite Le Gaulois se définit comme un « journal des informations du matin et moniteur de l’ancien esprit français ». Sans surprise, son lectorat, assez limité, appartient essentiellement à la grande bourgeoisie. En 1929, le journal est absorbé par Le Figaro.

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