Extrait du journal

-Comme j'assistais, l'autre,- soir, à une représentation du Jongleur de NotreDame, ma pensée s'envolait sur les ailes de cette strophe mélancolique vers les régions du rêve et je me demandais si ceux qui l'écoutaient avec moi en comprenaient bien. la philosophie douloureuse et d'une si poignante actualité. Car,' nous âussi; les vainqueurs, nous restons écrasés sous lé poids de notre» orgueil insolent. Qu'au lendeshain de. 4a' guerre, la .solidarité des armes faisant place à l'antagonisme des intérêts, aux inimitiés des hommes d'Etat,. et même aux vulgaires préoccupations parlementaires, une sorte de.remous se produisît, c'était sans doute inévitable. Du moins, j'imaginais que ce serait l'affaire d'un temps, et que tout reprendrait son équilibre dans un monde assaini, dans une atmosphère épurée par la guerre. Déjà je me réjouissais d'entendre les couplets de Tipperary se marier avec ceux de la Madelon. J'applaudissais à ces pèlerinages de chefs de gouvernements, de grands soldats, même de souverains comme le roi d'Angleterre visitant nos provinces dévastées, tandis que la cohorte des mères, des fiancées, des jeunes filles, allait s'agenouiller sur les tombes de nos héros. Autour de ces tombes, le printemps, puis l'été avaient fait sortir de terre tout un tapis de fleurs blanches qui s'étendait sur. des kilomètres et sur des lieues. Avec ces fleurs allaient fleurir, dans l'âme humaine renouvelée un printemps de foi et d'espérance, un été d'union créatrice de force....