Extrait du journal

LE voyageur qui se rend en Allemagne est frappé par le total dénuement de ce pays dont les ruines, la misère et la faim sont le triste apanage. Les villes détruites, certes, y sont nombreuses et sont à peine déblayées. Mais ce qui retient surtout l’attention, c’est le déplorable état de la population civile qui ne connaît qu’une chose : les privations. La nourriture et l’habillement y sont très insuffisants. Le repas habituel d’un foyer allemand moyen se compose de pommes de terre à l’eau, de pommes et d’un maigre morceau de pain. Et encore faut-il s’estimer heureux ! Nombreux sont les enfants qui marchent nu-pieds, faute de chaussures. Nombreux sont les gens qui s’habillent de guenilles, faute de vêtements. L’être le plus insensible, pénétrant de nuit dans une gare allemande, serait saisi d’un indicible sentiment de pitié en voyant tous ces malheureux sans-logis, au visage famélique, étendus pêle-mêle sur les bancs et souvent sur le sol, attendant un lendemain qu’ils n’osent plus espérer meilleur. Les gares sont aussi le refuge des trafiquants du marché noir qui s’est installé en Allemagne et que ies autorités françaises d’occupation ne s’employant guère à combattre....