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Le Matin, 26 octobre 1903

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Le Matin
26 octobre 1903


Extrait du journal

rc Après la capitulation du 28 février, la situation matérielle ne changea point brusquement dans Paris, et il n'y eut qu'une tristesse de plus.. Tant d'efforts 'demeurés inutiles, tant de sacrifices vailJamment acceptés pour arriver à ce dénouement lamentable I Oh le découragement des jours qui suivirent la signa'ture de cette convention, contre laquelle nous nous révoltions Et le froid terrible, et la neige, et la faim angoissante 1 Puisque tout était accompli, elle redevint la seule préoccupation des Pari'siens. Beaucoup d'entre eux s'étaient 'imaginés que les vivres, pouvant désormais passer, allaient arriver immédiate;ment, mais il n'en était rien. Ce ne fut que le 3 février, vers le soir, je m'en souviens, qu'on placarda une affiche annonçant annonçant seulement les provisions envoyées par les Anglais. Bonne promesse, mais il fallait encore attendre. Le pain que nous donnait le rationnement n'avait jamais été plus noir, plus répugnant il semblait qu'on né l'eût jamais composé de matières aussi invraisemblables. Quelque appétit que nous eussions, il contenait tant de paille qu'on ne pouvait le manger. Il paraît que certains privilégiés avaient su faire utiliser à leur profit les farines qui restaient, mais le commun des mortels, dont j'etais, ne cessait de souffrir des pires privations. Quand j'appris qu'on avait pillé, rue de Rivoli, quelques charrettes, où l'on avait. deviné, sous les bâches, des denrées singulièrement précieuses à ce moment, je me rappelle, tout homme d'ordre que je fusse, que j'éprouvai un sentiment d'envie à l'égard des chena-v pans qui avaient profité de l'aubaine. Tant d'amertumes, un écrasement de honte, être forcé d'accepter toutes les fatalités, et ne pouvoir même pas en finir avec ce tenaillement de la faim Les miens étaient à bout de forces. Moi-même, je n'en pouvais plus. Il fal'lait, comme on dit, « se débrouiller ». Je m'avisai de l'idée de me rendre à Versailles pour y aller chercher de quoi mainger, simplement du pain, au besoin. Cette idée-là était venue à nombre de gens affamés. Mais il fallait un laissezpasser pour franchir les lignes prussiennes, et je tentai vainement, toute la journée du 4 février, de l'obtenir. Il y avait un désordre extrême à la préfecture de police, et quelle cohue de solliciteurs Ce ne fut que le 5, après de tenaces et patientes démarches, que je fus mis en possession du précieux papier. Il était ainsi formulé...

À propos

Lancé en 1883 sur le modèle du quotidien britannique le Morning News, Le Matin se revendiquait être un journal novateur, « à l’américaine ». Son directeur Alfred Edwards entendait donner « priorité à la nouvelle sur l’éditorial, à l’écho sur la chronique, au reportage sur le commentaire ».

 
 
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