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Le Petit Journal, 26 février 1922

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Le Petit Journal
26 février 1922


Extrait du journal

Nous ne pourrons jamais oublier celaLes étoiles venaient de s'éteindre. Dans une caserne proche, un clairon avait sonné la diane. L. régnait un angoissant petit jour, bruineux, ma ladif, couleur de suie délavée. Les pavés étaient gras d'une humidité malsaine. Il faisait froid. Importe de la prison s'ouvrit à deux battants. Tout le monde ôta son chapeau. Un groupe d'hommes sortit, aumônier, aides, gardiens, tous vêtus de sombre, silhouettes fon dues, comme d'un coup d'estampe, dans le gps ambiant, comparses imprécis et fugitifs. . Au milieu d'eux, un spectre. On ne vit d'abord qu'une tache blanche : une chemise échanorée bouffant au vent du matin. Au-dessus de la chemise, quelle figure I Elle était si blafarde, crayeuse et verte- à la fois, qu'on l'eût dit éclairée par des projecteurs croisés. Une barbe courte découpait ses angles noirs sur ce masque tragique et le crâne im mense eût concentré toute la lumière si les yeux, grands ouverts, n'eussent brillé, et de quelle lueur I Cette tâte épouvantable..- et flère était dressée sur un coil maigre, long, tendu dans un effort désespéré pour dominer d'une nargue dernière la foule et les bourreaux. Le bas du corps était gainé de noir, et flageo lant parce que ligoté, incapable d'obéir à la volonté de son possesseur. Landru s'avançait, entravé, soutenu et poussé par les aides et d'aucuns prirent deux cahots inévitables pour des hésitations. Je crois qu'ils se sont trompés. Landru se laissa docilement coucher sur la machine. II est mort bravement, sans un mot. Il a jusqu'au bout maîtrisé sa peur. Nous au tres, nous avions passé la nuit à avoir peur pour ltii. Novia- avons fait les cent pas sur la petite place, devant la prison, où des ombres allaient et venaient derrière une fenêtre éclairée. Nous1 avons foulé les cinq mètres de pavés disjoints où la guillotine allait s'élever à l'aube. Nous avons contefnplé pendant des heures le kiosque à journaux tout voisin, fermé, ironique et dont les vitres illuminées, historiées d'affiches rieuses, chantaient la gloire d'un thé plus ou moins cin ghalais. Nous avons épié les bruits nocturnes et nous avons répété vingt fois : — Pourvu qu'il n'aille point entendre !... Ce fut d'abord le bruit sourd des soldats eu marche : une compagnie du génie qui allait se ranger aux issues du carrefour. Les crosses des armes reposées toutes ensemble sonnèrent sur la terre qu'ébranlèrent ensuite les'sabots de la cavalerie. Puis des pas isolés éveillèrent les échos r: l'aumônier qui arrivait, les avocats. Puis le fourgon parut, tapissière aux airs de corbillard, traînée par deux chevaux puissants...

À propos

Fondé en 1863 par Moïse Polydore Millaud, Le Petit Journal était un quotidien parisien républicain et conservateur parmi les plus populaires sous la troisième République. Le journal jouit vite d’un succès commercial sans précédent, renforcé par la publication de divers suppléments, parmi lesquels son célèbre « supplément du dimanche » ou encore Le Petit Journal illustré. La publication s’achève à l’orée de l’année 1944.

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