PRÉCÉDENT

Le Petit Marseillais, 10 juin 1908

SUIVANT

URL invalide

Le Petit Marseillais
10 juin 1908


Extrait du journal

La Peur de la Liberté Il n’y a pas de juges qu’à Berlin ; nous en avons aussi à Paris. Je ne l’ignorais certes pas, et mon étonnement n’est que de les trouver là où ils étaient le moins atten dus : au tribunal des conflits. Vous savez ce qu’est le tribunal des con flits : c’est un tribunal inventé tout exprès pour donner raison au gouvernement. Or, oes juges-là, précisément, ces juges triés et qu’on pourrait croire complaisants, viennent, dans une affaire intéressant au plus haut degré les libertés publiques, de rendre contre le gouvernement, représenté en l’occurrence par un de ses préfets, un arrêt qui confirme les Français dans un droit essentiel et qui leur sera, par sur croît, de bon secours contre les instituteurs antipatriotes. Cette histoire mérite bien un bref rappel et deux mots de commen taires. L’instituteur d’une commune de la Côted’Or ayant, au rapport de plusieurs témoins, tenu dans l’école publique des propos, les uns simplement contraires à la neutralité religieuse, les autres grossière ment obscènes, d’autres encore qui ten daient à détruire dans l’âme des petits éco liers l'amour de la patrie et le respect du drapeau, un père de famille a considéré ce langage comme gravement nuisible à son enfant et assigné en dommages-intérêts devant le tribunal civil le mauvais maître qui en était l'auteur. Les juges de première instance se décla rèrent incompétents ; mais la cour d’appel de Dijon, saisie à son tour, jugea que les propos attribués à l’instituteur n’avaient aucune espèce de rapport avec les choses qu’il est, de par la loi, chargé d’enseigner aux enfants et que, en conséquence, il y avait lieu de retenir l’affaire. C’est alors que le préfet prit un arrêté de conflit, se fondant sur ce que les propos allégués, même s’ils étaient reconnus exacts, « ne pouvaient relever que de l’au torité administrative ». Vous sentez tout de suite le point faible de cette argumentation. Nul ne conteste que l’instituteur relève d’abord de ses su périeurs qui, lorsqu’il manque de façon aussi grave à ses devoirs, ont tout pou voir £>our le frapper disciplinairement. Mais cela n’empêche nullement que le dit instituteur demeure, comme tous les ci toyens français, justiciable de l’article du Code en vertu duquel « tout fait de l’homme qui cause un dommage à autrui entraîne pour celui qui en est l’auteur l'obligation de le réparer »....

À propos

Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.

En savoir plus
Données de classification
  • napoléon
  • viviani
  • clemenceau
  • joseph bonaparte
  • karl marx
  • frédéric masson
  • baron an
  • a. elbert
  • de beauharnais
  • reine de suède
  • marseille
  • joseph
  • espagne
  • rennes
  • france
  • clary
  • paris
  • calais
  • alger
  • rome
  • la république
  • agence havas
  • parlement
  • école publique
  • boucheron
  • transatlantique