Extrait du journal

C’est le six mai, jour de scrutin— Il s’est levé de grand matin, Très inquiet sur son destin, Car sur les murs son nom s’étale; Son triomphe est-il arrivé? Toute la nuit il a rêvé, — Et c’est pour ça qu’il s’est levé — L’urne fatale! Que recèles-tu dans tes fiançai Dit-il avec des airs tremblants, Umo que des yeux vigilants Surveillent toute la journée? Serai-je élu? Je n’en sais rien. Quel sort, demain, sera le micnl C’est pourtant là-dedans que tient Ma destinée! A mon comité, très soumis, J’ai tout signé, j’ai tout promis; Je consacrerai,mes amis, A mes graves devoirs d’édile Mes jours, mes nuits... et caeteral Le peuple enfin respirera Si vous m’envoyez siéger à L’hôtel do ville ! « Irai-je! pense-t-il tout bas— * Serai-je élu? Je ne sais pas !» Il voit soudain, hâtant le pas — Ouvrier ou capitaliste — Un électeur... vite il le suit. Dam ! c’est le grand jour aujourd’hui... Va-t-il au moins voter pour lui Et pour sa liste? Après s’être bien promené. Il rentre ; il n’a pas déjeuné— Aux rires de son dernier né 11 répond gai comme un ermite— Devant le potage il s’asseoit Au scrutin songeant malgré soi, Dans sa pensée il aperçoit L’autre marmite ! Et tout le jour s'écoule ainsi. Dans les transes, dans le souci, De temps en temps il va voir si Parfois quelque électeur l'efface. Ou si sa liste par paquet Se traîne, hélas ! sur le parquet— Bref, ce jour d’ennui compliqué Ainsi se passe... Demain parmi les trente-six Notre homme sera-t-il assis ? Le soir vient; il court,indécis— Au fond de l’urno son nom reste. Sur son affiche — long tréteau — Pour avoir sa part du gâteau. Le dévouement fut son manteau, Et c’est maintenant une veste i XAVIER MAUNIER....