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Le Petit Parisien, 8 juin 1932

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Le Petit Parisien
8 juin 1932


Extrait du journal

■ Voici le texte du message adressé au Parlement par M. Albert Lebrun, président de la République française, et qui a été lu au Sénat par M. René Renoult et à la Chambre par M. Edouard Herriot. Un attentat abominable qui a frappé la France de douloureuse stupeur et qu'a flétri la conscience universelle, soulevée dans un sentiment d'unanime réprobation, vient d'enlever à la patrie un de ses plus nobles enfants. Que ma première pensée aille à Paul Doumer, au vaillant démo crate dont vous aviez fait, il y a un an à peine, le gardien vigilant de nos institutions. Après une vie exemplaire vouée tout entière au culte de la-famille et de la République, il s'en est allé rejoindre dans la mort ses quatre fils tombés au service de la France. Puisse, pour les lourdes tâches de demain, le souvenir de ce grand citoyen sans reproche nous soutenir et nous guider. Comment ne puiserions-nous pas aussi un puissant réconfort dans le spectacle impressionnant donné au monde attentif par l'Assemblée nationale ? Elle a su, dans le calme et la dignité, remplir le rôle qu'elle tient de la loi constitutionnelle. La transmission régu lière des pouvoirs a montré une fois de plus la solidité, l'intangibi lité du régime démocratique avec lequel notre pays s'incarne de plus en plus étroitement. En m'élevant à la Présidence de la République, l'Assemblée m'a décerné un honneur dont je ressens vivement tout le prix. J'en éprouve une gratitude d'autant plus profonde que cette manifesta tion a été empreinte de la plus imposante spontanéité. Veuillez trouver ici, messieurs, l'expression de mes très sincères remer ciements. Je ne me dissimule pas les grands devoirs que m'impose votre choix. Je m'estimerai heureux si, par un labeur que rien ne rebutera, je puis, avec le précieux concours du Sénat et de la Chambre des députés, ne pas rester au-dessous de ce que la France est en droit d'attendre de mon effort. Me maintenant strictement dans les limites du pouvoir que me confère la Constitution, je m'appliquerai à en assurer jalousement la garde et à en faciliter le libre fonctionnement. Arbitre impartial des partis, je m'emploierai à maintenir et à élargir, si possible, l'union des cœurs et 1 harmonie des esprits, que réclament chaque jour davantage de hautes préoccupations d'ordre national. Serviteur ardent et passionné de la France, je donnerai, comme il se doit, mon constant souci et mon dévouement absolu aux intérêts vitaux de la patrie. Aussi bien la situation présente requiert l'attention de tous. Il ne faut pas craindre de la regarder en face, non pour y voir des motifs de découragement, mais pour y trouver de nouvelles raisons d'agir. Une crise économique d'une ampleur exceptionnelle par sa durée et sa gravité s'est abattue sur le pays. Elle le menace dans ses œuvres vives comme elle a ébranlé le monde dans ses fondements essentiels. Elle provoque l'arrêt des transactions commerciales, la para lysie des industries, le redoutable cancer du chômage, qui entraîne dans l'organisme des peuples tant de troubles spécifiques, la régres sion des impôts, qui compromet l'équilibre des budgets et menace le crédit. Il convient d'aborder avec un courage tranquille et un ferme; sang-froid les problèmes financiers qui se posent. Nous ne dissimu lons pas que la réussite de cette entreprise exige de fortes vertus, une application opiniâtre et de nouvelles privations. Le gouvernement et les Chambres auront le souci de rétablir dans leur ancienne prospérité notre agriculture, notre commerce, notre industrie, et de poursuivre efficacement, pour le mieux-être des populations indigènes, la politique coloniale, qui nous a valu le prestigieux domaine d'outre-mer dont, il y a un an, Paris et ses hôtes pouvaient admirer, sous les ombrages du bois de Vincennes, le magnifique épanouissement. Par ailleurs, la France est engagée dans des conversations inter nationales de la plus exceptionnelle importance pour l'économie générale et la paix du monde. Membre fervent de la S. D. N., elle y participera avec un loya lisme intégral et une bonne foi absolue en l'espoir d'aboutir. Les importants sacrifices qu'elle a consentis depuis la fin de la grande tourmente ne sont-ils pas la preuve manifeste de son désintéresse ment et de son attachement à la solidarité qui doit exister toujours plus étroite entre les nations et les amener à pratiquer une politique d'entr'aide et de soutien mutuel ? Elle devra seulement, dans cet effort commun, garder la préoccu pation légitime de sa sécurité, de son indépendance et de sa stabi lité, gages importants de la paix générale. Elle s'efforcera aussi de faire prévaloir les grands principes de respect des conventions signées et de la parole donnée qui, dans les relations des peuples comme dans celles des hommes, sont généra teurs de confiance et de crédit, bases essentielles de la prospérité à laquelle tout le monde aspire. Ainsi assisterons-nous à la reprise progressive et sagement ordonnée des activités économiques. Ainsi verrons-nous grandir, dans l'harmonie des peuples, notre République démocratique au clair et lucide visage de raison que, pour ma part, à l'exemple de mes éminents prédécesseurs, j'ai l'unique ambition de bien servir....

À propos

Le Petit Parisien est un grand quotidien français, publié entre 1876 et 1944. Il était l’un des principaux journaux sous la Troisième République.

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